Yves Montand

hronologiquement Yves Montand sera sans doute le dernier des interprètes sur lequel nous dresserons une fiche dans notre série sur la chanson française du Temps des cerises aux Feuilles mortes non pas parce qu'il fut le premier à interpréter ces "Feuilles mortes" (cet honneur revient à Cora Vaucaire) ni parce que c'est avec lui que la chanson post-1945 a débuté mais parce que - et cela en surprendra plusieurs - il fut sans doute le dernier des grands interprètes issus du music-hall , nous ajouterions même "d'avant-guerre".

On sait qu'il a débuté en 1938 (il avait alors 17 ans) en interprétant des chansons de Trenet ou des succès de Chevalier et même de Fernandel en prenant bien soin de les interpréter à sa façon, presque comme un comédien à qui on aurait donné la permission de chanter, danser ou même mimer le texte qu'il avait à dire.

Ce n'est pas avec Montand que débute l'ère des interprètes dont la personnalité a fait qu'on a fini par dire "une chanson de Piaf, de Brassens ou de Ferré" : le répertoire de Montand est d'une grande variété et, en cela, il a suivi le chemin indiqué par les interprètes des années trente et quarante qui, chacun selon ses moyens, se sont appliqués à faire d'une chanson une pièce musicale et un poème dans laquelle trois personnes ont contribué : l'auteur, le compositeur et l'interprète.

L'étendue phénoménale de son répertoire en dit long sur sa conception de ce que doit être un artiste de music-hall (parce que,qu'on le veuille ou non, Montand est resté - en dehors de ses prestations au cinéma et au théâtre - un des rares à donner tout au long de sa longue carrière des tours de chant qui auraient facilement passé la rampe durant l'âge d'or de cette forme de spectacle). - On n'a qu'à citer "Dans les plaines du Far-West", "Les grands boulevards", "Barbara", "le Flamenco de Paris" de sa première période, "La chansonnette", "L'étrangère", "Syracuse", "Mon manège à moi" de sa deuxième (et l'on pourrait continuer comme ça longtemps) pour comprendre qu'il s'agit là non pas d'un chanteur pour qui on fait des chansons sur mesure (bien qu'on en ait faites) mais bien d'un chanteur qui a eu comme principe qu'une chanson, ça s'interprétait et que ce n'était pas une chose qu'on tirait vers soi. En cela, on lui a souvent reproché de s'être jamais complètement livré. Mais pourquoi l'aurait-il fait ?

Ceux qui ont assisté aux différents one-man-shows que Montand a donné dans les années cinquante,  soixante et même soixante-dix vous diront tous la même chose : que tout était parfait : le son, l'orchestration, la lumière, les gestes, la voix qui, ensemble, faisaient de chaque pièce un petit chef-d'œuvre. Pas beaucoup d'émotion, nous vous le concédons, mais qui - et c'est une question à laquelle il serait peut-être temps qu'on réponde - va au spectacle pour entendre parler des histoires d'amour, de la joie et de la misère d'un ou d'une autre ?


Pour mémoire

Né Ivo Livi mais naturalisé français en 1929, Yves Montand est né à Monsummano Alto, en Italie, le 13 octobre 1921 et est décédé à Senlis le 9 novembre 1991.


Enregistrements

Parmi - au dernier décompte - les près de 500 enregistrements que Montand a faits (sans compter les enregistrements live et les prestations à la télévision ou sur films), nous avons voulu retenir dans le cadre restreint de nos propos, "Les feuilles mortes" (forcément...) et sa version d'une chanson de Francis Lemarque qu'on pourra éventuellement comparer à celle de Francis.

D'abord, tiré du film de Carné :

"Les feuilles mortes" - 1946

De Prévert et Kosma

Voir également la vidéo diffusée dans notre série La chanson française... en 50 chansons au numéro 51)

"À Paris" - version de 1948

De Francis Lemarque