PAGES ANNEXES
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Discographie
Photographies
































































































































Gaston Couté

ontrairement à la majeure partie des médecins, architectes, académiciens qui figurent dans Le Grand Larousse, Gaston Couté (qui n'y figure pas) aura eu sa statue. Plus encore : un grand site Internet et un musée à lui tout seul.

Né en Beauce en 1880, ce fils de paysan commence à réciter ses textes à Paris en 1898 à l'encontre des vœux de ses parents qui l'auraient vu dans l'administration des finances de la Nation. Il revêt d'abord le costume de son pays puis passe très vite à un autre plus adapté à ses chansons où il fustige les bourgeois, son époque et l'égoïsme de ses contemporains.

Sa carrière sera courte : il mourra, de l'abus d'alcool, en 1911 non sans avoir laissé derrière lui des textes mémorables.

Ce "gars qu'a mal tourné" (titre d'une de ces chansons) n'a pas si mal tourné, en fin de compte : à Meung-sur-Loire (Loiret - 45), là où il est né, son buste orne le mail au bord de la Loire et on y trouve depuis la fin de la guerre un musée, fondé par Roger Gauthier, qui contient plusieurs de ses manuscrits et de ses dessins de même qu'une grande partie de son œuvre imprimée, une bibliothèque des ouvrages le citant, des affiches de ses prestations, etc. - Installé dans une ancienne salle d'école, près de la porte d'Amont, ce musée est accessible sur demande auprès de la Mairie (Monsieur Gandon, archiviste). - (Informations fournies par Alain Renault, petit-fils d'un ami d'enfance de Couté.)


Pour de plus amples renseignements

Un site complet sur ce poète qu'on redécouvre de plus en plus :

http://gastoncoute.free.fr

(Sa vie, son œuvre, des commentaires, de nombreux textes, etc.)

Meung-sur-Loire

Meung sur Loire est situé sur... la Loire, à 18 km en aval d'Orléans. - Ancienne collégiale romane, château des évêques d'Orléans, comportant une tour carrée médiévale avec un logis principale remanié au 18ième, des oubliettes où séjourna François Villon, des restes de remparts (Porte d'Amont), quelques maisons médiévales, d'anciennes écuries de Louis XI (où Jeanne d'Arc passa une nuit), etc., etc. - Plusieurs mauves ayant servi à animer des moulins à eaux. - Gaston Couté fut le fils d'un meunier installé à celui de Clan, qui existe toujours. (Alain Renault)

À propos de Gaston Couté

Voici ce que Michel Herbert (La Chanson à Montmartre, La table ronde, 1967) a écrit à son sujet :

"Né à Beaugency en 1880, ayant passé sa première enfance dans le moulin paternel de Meung-sur-Loire, cette petite cité pleine du souvenir de François Villon, Gaston Couté était destiné par une famille ambitieuse à l'administration des Finances nationales. En conséquence, il fut confié au lycée d'Orléans, mais, rimant et rêvant d'autres succès, il partit pour Paris en 1898, avec cent francs en poche".

Commentaire (Alain Renault) :
"À la gare de Meung-sur-Loire son père lui remet effectivement 100 F en lui annonçant qu'il n'aura plus rien mais que son retour sera toujours bien accueilli..."

"Admis à réciter des vers à Al Tarlane, il délaissa bientôt ce cabaret, où il se produisait gratuitement, pour l'Âne Rouge dont le patron, plus généreux, lui allouait en guise de salaire un café-crème quotidien. On ne devine que trop que fut l'existence du pauvre déraciné réduit à cette maigre pitance, à laquelle s'ajoutaient parfois les alcools corrosifs offerts par d'aimables spectateurs. Il subsista ainsi, pourtant, pendant un an, créant "Le champ de naviots", et tant d'œuvres d'une facture déjà puissante, cris de révolte d'une âme simple et droite se dressant face à la Société égoïste et veule pour laquelle "l'honneur quient [tient] dans l'carré d'papier d'un billet d'mille".

"De l'Âne Rouge, Gaston Couté passa aux Funambules [...]

"S'il atteignit la gloire, il ne connut jamais l'aisance. C'est au point qu'un soir, un noctambule qui avait heurté du bout de sa canne un gros tuyau de ciment gisant sur un chantier de la Compagnie du Gaz eut la surprise d'en voir sorti Couté mal réveillé. Injurié par celui-ci, l'autre s'excusa, convia le chansonnier à souper et lui loua pour une semaine un gîte plus normal dans un hôtel de Montmartre.

"Le logis qu'il apprécia le plus fut l'arrière-boutique d'un bougnat, non à cause de son confort relatif, mais parce que le local n'était séparé que par l'épaisseur d'une porte condamné d'un tonneau de vin installé dans le débit. [...]

"Sincère dans ses propos comme dans ses œuvres, Gaston Couté distribuait avec beaucoup trop de générosité les vérités désagréables [...]

"Son indépendance, et aussi, hélas !, son intempérance, faisaient de [lui] un pensionnaire inconstant. C'est pourquoi il ne figura pas à la place d'honneur qui lui revenait sur les programmes de nos cabarets. Bast ! Il chantait et cela lui suffisait.

"Victime de l'alcoolisme, il mourut en 1911, à l'hôpital Lariboisière, laissant une œuvre admirable [...] Son père vint l'accompagner à sa dernière demeure. Rageur et têtu, le brave meunier n'avait pas pardonné. Il ne desserra les dents qu'au cimetière pour marmoter en jetant la pelletée de terre symbolique sur le cercueil de son gars "qui avait mal tourné" : "T'as voulu y venir à Paris, eh ben, t'y v'là maint'nant !" Ce fut l'oraison funèbre de Gaston Couté. Quelle belle chanson elle lui eût inspirée !"

Commentaire (Alain Renault) :
"Il s'agit [là] d'une légende due à une mauvaise lecture d'un texte de Carco, complètement démontée par les ouvrages consacrés à Gaston Couté. D'ailleurs ce dernier n'a pas été enterré à Paris mais à Meung-sur-Loire dans le caveau familial (toujours présent au "Champ d'naviots" - le cimetière."

Ce que Couté disait de lui-même

"C'est égal ! Si jamés je r'tourne
Un jour r'prend' l'air du pat'lin
Ousqu'à mon sujet les langu's tournent
Qu'ça en est comm' des rou's d'moulin,
Eh ben ! I' faura que j'leu dise
Aux gâs r'tirés ou établis
Qu'ont pataugé dans la bêtise,
La bassesse et la crapulerie
Coumm' des vrais cochons qui pataugent,
Faurâ qu' j'leu' dis' qu' j'ai pas mis l'nez
Dans la pâté' sal' de leu-z-auge...
Et qu'c'est pour ça qu'j'ai mal tourné !..."

Gaston Couté : "Le gas qui a mal tourné"

Parmi ses titres de gloire

"Le gâs qu'a perdu l'esprit" (musique d'Eugène Poncin) - 1900

"- Ohé là-bas ! bourgeois qui passe,
Arrive ici que je t'embrasse ;
T'es mon frère que je te dis
Car, quoique t'as de bieaux habits
Et moi des hardes en guenille,
J'ons tous deux la même famille
"

Voir ici.

"La Toinon" (musique de Gérard Perron - en 1979) - 1900

"Paraît qu'la Toinon qu'est arti' coumm' bonne
Pour aller sarv' cheu des gens d'Paris

S'appelle à pesent : Madame la Baronne ;
Moué, je suis resté bêt'ment au pays,
Ça ne m'a jamais v'nu dans la caboche
Ed' coller un "De" par devant mon nom...
Et pourtant, du temps qu' j'étais tout p'tit mioche
J'allais à l'école avec la Toinon..."

"La Julie Jolie" (musique de Léo Daniderff) - 1904

"Pour quatr' pair de sabiots par an
Avec la croûte et pis l'log'ment
I' fit embauch' de la Julie...
...
I' s'enstit d'venir amoureux
Et sauta dans l'lit d'la Julie...
...
Vendit sa lande et son troupet
À seul' fin d'se fair' des jaunets
Pour mettr' dans l'bas blanc d'la Julie
...
Ayant donné jusqu'à sa ferme
A l'mit dehors, aux vents du ch'min
...
Avec la croute et pis l'log'ment
I' s'embaucha cheu la Julie..."

"Les mangeux d'terre" (musique de Maurice Duhamel) - 1905

"O mon beau p'tit ch'min gris et blanc
Su l'dos d'qui j'passe !
J'veux pus qu'on t'serr' comm' ça les flancs
Ca moué j'veux d'l'espace !
Ousqu''est mes alumett's ? À sont
Dans l'fond d'ma pan'tière...
Et j'frais r'culer vos mouessons,
Ah ! les mangeux d'terre !"

"Va danser !" (musique de Marcel Legay) - 1905

"Après ça, tu te marieras...
Et quand la moisson sera haute
Avec ton bonhomme au rude bras
Moissonnant un jour côte à côte
Vous viendrez peut-être à parler
Émus de pitié grave et sobre
De Jean qui mourut en octobre
D'un mal pris en fauchant les blés..."

"Jour de lessive" (musique de Léo Daniderff - en 1924) - 1910

"Quand je t'aurai conté ma vie
Malheureuse d'affreux salaud,
Ainsi qu'on rince à la fontaine
Le linge au sortir du cuvier,
Mère, arrose mon âme en peine
D'un peu de pitié !"

Discographie - Album photos

On trouvera en annexe une discographie détaillée des enregistrements des chansons de Gaston Couté.

Cette discographie est l'œuvre d'Alain Renault qui nous a gracieusement donné la permission de la reproduire ici.

En annexe également diverses photos reliées à Gaston Couté de la collection personnelle de Monsieur Renault.


Spectacle (voir à notre page "Spectacles")


Le Spectacle d'Alain-René GEORGES
mise en scène de James HODGES


Ajout du 23 octobre 2012

Extrait de Montmartre et ses chansons (H. Daragon, libraire - 1902) de Léon de Bercy :

Un matin de novembre, en 1898, je longeais d'un pas pressé le boulevard de Rochechouart, regagnant le logis conjugal où m'attendait le déjeuner. En passant devant le cabaret Al'Tartaine, je m'entendis appeler. Craignant la "barbe", comme on dit à Montmartre, je fis le sourd et précipitai l'allure. Mais ce fut en vain : à peine étais-je arrivé au coin de la rue Dancourt qu'une main se posait sur mon bras. Cette main appartenait au chanteur Buffalo.

"- Bonjour, mon vieux, me dit-il. As-tu une seconde ? Je voudrais avoir ton avis sur une pièce de vers très curieuse."

Et il m'entraîna au local où il avait coutume d'officier. On nous versa l'apéritif et je lus en hâte les strophes manuscrites sur lesquelles Buffalo et ses patrons attendaient mon appréciation. Elles étaient écrites en vers patoisés avec des termes aux articulations fortement ouvertes et des expressions paysannes fleurant le terroir chartrain. Très colorées, elles dégageaient une mélancolie un peu rude où se devinait une pointe d'amère misanthropie; elles avaient pour titre : "Le Champ de Naviots".

"- Mais c'est très bien ! m'écriai-je après avoir relu plus attentivement le poème. Et de qui est-ce ?
"- D'un p'tit gâs qu'arrive de son patelin, me dit Buffalo.
"- Gaston Couté. Il n'a que dix-huit ans. "

- Il faut vous l'attacher, dis-je à Taffin, le directeur d'Al'Tartaine. Voilà une note nouvelle, originale, qui intéressera certainement le public; et j'estime que ce petit bonhomme-là est un poète, un vrai, et qu'il faut l'encourager. Je serais bien étonné si, d'ici peu, il ne nous forçait à l'admirer par la production de quelque "tartine" de large envergure. Engagez-le. Vous vous en féliciterez, j'en suis sûr."

A cette époque, je faisais partie de la troupe des Quat'z'Arts et, malgré mon vif désir d'entendre au plus tôt le jeune Couté, il ne me fut loisible de me rendre Al'Tartaine qu'un mois plus tard. L'auteur du "Champ de Naviots" n'y était déjà plus. Un ancien fêtard du nom de Barthélémy, qui, après avoir dissipé en peu de temps une fortune de plus d'un demi-million, chantait à l'Ane-Rouge sous le pseudonyme de Bartholo, avait entraîné Couté au cabaret de l'avenue Trudaine. J'y allai en hâte; mais le "tour" de Couté étant passé, j'en fus pour mes pas et dus partir sans avoir eu le plaisir de l'applaudir.

Deux mois plus tard, je trouvai mon poète au sous-sol des Funambules, où Georges Oble, qui dirigeait le concert-apéritif, l'avait engagé sur audition à raison de 3 fr. 50 le cachet. Il m'apprit qu'il était né à Beaugency le 23 septembre 1880; que son père, qui exerçait la profession de meunier, se promettait de lui faire embrasser la minoterie; que son peu de dispositions pour cette carrière avait suscité au percepteur de l'endroit l'idée de le préparer à un emploi administratif dans le département des Finances, qu'avide de liberté il avait tout lâché, assurant à ses parents avoir trouvé une place à Paris, que ceux-ci, crédules, l'avaient embarqué pour la capitale le 31 octobre l898 avec, en poche, un billet de cent francs, bientôt dépensé, que, enfin, ayant dit ses vers Al'Tartaine et à l'Ane-Rouge pendant six semaines, ne recevant comme rémunération qu'une consommation (un café-crème ordinairement), il avait connu les jours sans pain et les nuits sans gîte.

On l'annonça:

"- Le poète beauceron Gaston Couté, dans ses œuvres !"

Coiffé de son chapeau mou, couvert de son mac-ferlane, il s'approcha du piano, gravit la petite estrade et, sans rien modifier de sa tenue, sans même un salut, il dit tranquillement, avec l'accent des paysans de "chez lui ", trois satires d'une philosophie âpre où sont mises en relief les hideurs de la fausse charité, de la fausse raison et de la bigoterie: "Un Gâs qu'a mal tourné", "Le Christ en bois" et "Un Gâs qu'a perdu l'Esprit". Flegmatique en apparence, mais rougissant un peu, il regagna ensuite sa place sous les bravos... !

Jules Mévisto ayant pris la succession d'Oble aux Funambules, le cachet de Coûté fut porté à cinq francs. Depuis, le poète beauceron s'est produit au Conservatoire de Montmartre, à l'éphémère Pa-Cha-Noir, au Carillon, à l'Alouette, aux Noctambules et au Grillon ; et partout son succès a été croissant. Ses œuvres les plus connues et les plus goûtées sont, avec celles que j'ai mentionnées plus haut: "L'École", "Les Conscrits", "Les Gourgandines", "Les Électeurs", "Les Cocus", "Chanson du Dimanche", "Les Vieux Sagouins", "La Belle Jeunesse", "En revenant du Bal", "Le Doute du Malchanceux", "Le Déraillement", "Chanson de Chemineux", "La Roue", "La Commune", "Un bon Méquier", "Les Deux Chemineux". Toutes ces poésies, jointes à beaucoup d'autres, formeront un volume qu'éditera prochainement Georges Ondet sous le titre: Chansons d'un Gâs qu'a mal tourné.

Gaston Couté dit actuellement ses vers aux Quat'-z-Arts, où il a remplacé Jehan Rictus. Il y a entre ces deux poètes de grandes affinités : ils sont mus par les mêmes sentiments de douce pitié; et l'horreur des iniquités sociales est chez eux également développée. Mais tandis que Rictus gémit, Couté est tout près de crier, la révolte chez lui bout davantage. Cela tient sans doute à ce qu'il est plus jeune, plus neuf et, conséquemment, non encore désillusionné. J'ajouterai que le patois de celui-ci me semble plus exact que l'argot de celui-là, qui sent trop le travail, qui est trop de la "littérature". Et je ne serais nullement surpris que le benjamin des poètes montmartrois n'éclipsât un jour son aîné dans la faveur du public de nos cabarets.