Louise Balthy

'est grâce à Leonetto Cappiello, Jules Cheret et Toulouse-Lautrec qu'on peut, aujourd'hui,  se faire une idée du style de Louise Balthy car la photo que nous avons pu retrouver d'elle ne nous renvoie pas l'image que Paulus a résumée en ces lignes :

"...du sang de chèvre dans les veines, une voix originale rappelant celle de Thérésa, une primesautière jouant à l'emporte-pièce et forçant les plus récalcitrants à s'ébaudir et à l'acclamer."   (Chapitre 32)

Les affiches et les dessins nous en disent plus

(De gauche à droite : un dessin et une affiche de Cappiello et une gravure de Toulouse Lautrec)


(De gauche à droite : une affiche de Chéret et un dessin de Cappiello pour la revue"Rire")

Elle aurait été une excellente meneuse de revue mais aucun film d'elle de Gaumont, aucune image dans les programmes de l'époque. Quant à sa voix, aurait-elle seulement été enregistrée ? Il ne semblerait pas. Et nous avons eu beau éplucher des centaines (lire : milliers) de petits formats, nous n'en avons retrouvé aucun à son nom. - Paraît (c'est son arrière-petit-neveu qui nous a renseigné) qu'elle aurait gravé une chose intitulée "La môme pétomane" (sic) et que J.-C. Averty aurait fait tourner dans son émission. - Nous nous permettons d'en douter : pas d'Averty ni de ses intentions (sans doute ses commentaires n'ont pas été retenus...) Peut-être s'agissait-il d'un de ces enregistrements anonymes débutant par un "Créée par, ou chantée par, ou du répertoire de..." ; il s'en est fait tellement.

Elle est née Marie Bidart à Arrancou (64 - Basses-Pyrénées aujourd'hui 64 - Pyrénées-Atlantiques) le 15 août 1867, fille de Louis Bidart et Anna Lassalle, et aurait suivi, selon les uns, quelques leçons de ballet avant de se tourner vers la chanson comique à l'âge de 17 ans. Selon d'autres, elle aurait été femme de chambre avant de devenir "professionnelle" pour ensuite passer à la chanson, poussée par un de ses "admirateurs". En 1891. Chauveau [*] la situe à l'Alcazar d'Été en 1886 ; ce qui correspondrait à la première version et à la période où Paulus parle d'elle dans ses mémoires (chapitre 32).

[*] Music-hall et café-concert - Bordas Spectacles - 1985.

On la sait au Moulin Rouge en 1903 (revue T'en as un œil - 100 représentations) mais elle a également chanté à La Cigale, à la Boîte à Fursy, aux Folies Bergère et même à l'Olympia, avec Polaire, en 1912. Hôtel particulier, rue de Chazelles à partir de 1909 ou 1910. Au Majestic, durant la guerre.

Après... Dans ses Cahiers bleus [**] Liane de Pougy nous en dresse, en 1919, le portrait suivant :

"Louise a de l'élégance, un chic rare, porte des chapeaux gigantesques qui ne vont bien qu'à elle, se vêt de noir et blanc, bien chaussée, bijoux à la dernière mode, vrais ou faux, s'y connaît en antiquailles comme le plus finaud des marchands, caresse un saxe ou une pâte tendre en connaisseur, comme un gourmet, s'est meublé un petit hôtel digne d'une reine : de rares meubles rares ; a fait une vente fructueuse. La petite paysanne basque a fait du chemin et peut servir de symbole et d'exemple, rit, chante, danse, aime, récite, ment, grogne, blague... Quelle vitalité ! Tout le monde l'aime bien, car la gaieté, c'est encore ce qui reste de meilleur au fond du verre. Sa voix a un charme extraordinaire, grave, sonore et modulée. - Un jour une jolie femme-sotte dit à quelqu'un devant moi, devant Louise : "Louise est laide." L'interpellée répondit : "Louise n'est laide que pour les imbéciles".

[**] Liane de Pougy - Mes cahiers bleus - Plon - 1977

En 1921, elle vivait chez un grand d'Espagne, José de la Pena du Guzman, un ex-modéliste et essayeur chez Doucet, rue de Ville-l'Évêque. - Voyages en Amérique. - Remonte sur scène mais pas pour longtemps. - En 1925, elle signe un engagement à l'Apollo mais, quelques jours plus tard, le 28 juillet plus précisément, elle s'alite. Deux jours plus tard elle était morte. - Une maladie qu'elle dissimulait depuis plusieurs mois.

Une grosse fortune, dit-on, et que ses sœurs se sont partagée. - Ses sœurs et... son frère selon le message que nous avons reçu de son arrière-petit-fils et donc arrière-petit-neveu, celui que nous avons cité ci-dessus...

Voir également la notice biographique de Jules Martin dans son livre Nos Artistes, en 1895.


Note : Les renseignements sur sa naissance et la date exacte de sa mort nous ont été fournies par Monsieur Patrick Ramseyer.

Voici ce qu'en disent Brunschwig, Calvet et Klein [***]

"Grande, mince, Louise Balthy était élégante dans son maintien, spirituelle et douée d'un grand pouvoir comique. Son intelligence mordante en fit une spécialiste des chansons rosses, qu'elle parsemait du mot de Cambronne."

[***] Cent ans de chanson française - Éditions du Seuil, Collection Points Actuels - 1981

Et puis vous a-t-on dit qu'elle jouait de plusieurs instruments et qu'elle chantait la tyrolienne ?

Tout un programme pour une femme qui, somme toute, a laissé très peu de traces derrière elle sauf une certaine influence.

Mentionnons quand même que, n'eut été de Monsieur de Guermantes, Madame de Guermantes l'eut volontiers invitée à une de ses soirées... [****]

[****] À la recherche du Temps perdu - Marcel Proust - La Pléiade, édition de 1989, vol. 4, page 571.