Charlotte Gaudet

oprano léger née, Louise Callet, à Saint-Ouen (75 - Seine, aujourd'hui 93 - Seine-Saint-Denis) le 2 octobre 1869 [1], décédée à Paris 10e, le 5 août 1934, compagne [*] d'Adolphe Bérard.

Philippe Chauveau (Music-Hall et Café-Concert - Bordas, 1985) la liste parmi les chanteuses qui auraient été, de 1905 à 1920, mais jamais en vedette, dans divers programmes de l'Alcazar d'Été, des Ambassadeurs, du Ba-Ta-Clan, du Casino Montparnasse, du Divan japonais, de l'Eldorado, chez Fantasio, aux Folies-Belleville, aux Folies Parisiennes, aux Folies Rambuteau, à la Gaîté-Montparnasse, etc.

[*] Note : En 1890, lorsque Gaudet fait la connaissance de Bérard, elle venait à peine d'épouser Lucien Fernand Michel Serwier. Qu'importe, elle le quitte pour vivre avec Bérard qui ne pourra l'épouser car le mari refuse de divorcer.

Répertoire

Son répertoire se situait dans le domaine grivois ou, comme on disait à l'époque, "semi-grivois". - Il ne variait pas beaucoup comme on pourra le constater en notant les répétitions dans la liste qui suit :

Chez Edison, en 1906 (cylindres de deux minutes) :

  • "Satyre et concierge" (ÉmileSpencer)
  • "Mon p'tit Nonhomme"
  • "Soldes et occasions" (Fred Pearly)
  • "C'est le printemps, c'est l'amour"
  • "Metella"
  • "C'qu'il est rigolo"
  • "Les mémoires de l'institutrice"(Tournayre)
  • "L'affaire K-Rus-O" (Clément Martin)
  • "Dans le paradis" (V. Soulaire / P. Forgettes)

(Tous des enregistrements datant de 1906)

Chez Odéon à la fin de la même année et en 1907 :
  • "Soldes et occasions" (FredPearly)
  • "C'que j'pense" (Eugène Jouve)
  • "Satyre et concierge" (ÉmileSpencer)
  • "Indiscrétions musicales" (Pierre Doubis)
  • "La femme cocher" (Tournayre)
  • "L' explorateur" (Émile Spencer)
  • "Nos voyages" (Charles Helmer)
  • "Les mémoires de l'institutrice" (Tournayre)
  • "Traitement de l'ouie" (Villé / C. Baron)
  • "Allô l'téléphone" (ÉmileSpencer)
  • "Dans le Paradis" (P. Forgettes et V. Soulaire)

Et finalement, chez Pathé,en 1910, des enregistrements qui n'auraient été publiés qu'en 1918 : [2]

  • "L'amour expliqué" (GeorgesKrier)
  • "Soldes et occasions" (Fred Pearly)
  • "Indiscrétions musicales"(Pierre Doubis)
  • "Le mariage du manchot" (Émile Spencer)
  • "Retour de Paris"(Émile Spencer)
  • "Le p'tit jeune homme" (Météhen)

Les quelques petits formats qu'on retrouve encore d'elle(voir ci-contre) ne nous renseignent pas plus sur sa carrière qui se termina vers la fin des années vingt.

Paulus, dans ses Mémoires dit d'elle :

"[Elle était] la seule,après Demay,qui ait su dire des énormités sans choquer. Les gauloiseries, dans sa bouche, [perdaient] leur gravelure. Le geste [était] sobre,presque nul ; l'œil malicieux [soulignait], mais discrètement. Elle [avait] la voix prenante et nette qui fait les parfaites diseuses."

Repiquages

On trouvera dans lacollection Anthologie de la Chanson Française chez EPM, album Les Chansons Grivoises, deux titres de Madame Gaudet :

 "Traitement de l'ouie" (Villé / C. Baron, Le pendu de Saint-Germain)

 et

"Dans le Paradis" (P. Forgettes et V. Soulaire), numéro 984782 - ADE 771 (2000).


Enregistrement

De la collection de Jean-Yves Patte, un des Pathé de 1910 cités ci-dessus :

"L'amour expliqué" - Auteurs inconnus

Pas une grande chose, évidemment, mais cela donne une idée de, comme disait Guitry, "ce dont se contentaient nos arrières-grands-parents" et qui, tout compte fait, n'était pas si mal.

[1] Merci Monsieur Béghin

[2] Erreur nous signale Monsieur Florian Royer qui nous dit qu'ils ont bien été distribués en 1910 car il en possède un, composé des titres "Soldes et occasions" (que nous écouterons ci-dessous) et "Le mariage du manchot" (étiquettes ci-contre)

"Soldes et occasions" (Fred Pearly) - 1910


Ajout du 14 juillet 2025

Dans le Courrier Français, l'illustré n°30 du 22 juillet 1888, page 8, Noël Gontran écrit :

CHARLOTTE GAUDET
" Au moment où les soirs d'été semblent se décider à mériter leur nom; où les brises tièdes soufflent, après la lourde journée, dans les bosguets des Champs-Elysées, les Ambassadeurs sont envahis par une foule d'amateurs de tons les âges, qui ont, pour l'honorable directeur de l'établissement, une affection quasi-filiale.

Aussi M. Ducarre s'attache-t-il à présenter son public, chaque année, quelque étoile nouvelle.

L'eétoile do cette année est toute mignonne, toute gracieuse, mis elle ne brille pas d'un éclat moins vif. Elle se nomme Charlotte Daudet; elle a dix-huit ans, un peu plus que l'âge de Juliette. Elle est née à Paris, et semble une gracieuse Athénienne de l'époque d'Aristophane, modernisée par Forain.

Un jour qu'elle écoutait chanter le rossignol, il lui prit fantaisie de mêler sa chanson à celle de l'oiselet; et le duetto fut exquis. Dès lors elle se sentit une vocation de cantatrice. Elle vit passer dans son rêve l'image de la Malibran et entendit à son oreille des poètes qui murmuraient des rimes immortelles.

Alors elle brûla d'affronter le grand public et fit ses débuts sur la scène du Jardin-d'Hiver, rue Vivienne. Ce fut un triomphe. Toutt le boulevard voulut l'entendre, et pour échapper aux protestations d'admirateurs cosmopolites qui pouvaient troubler son avenir, elle se réfugia dans un endroit plus parisien, où le rastaqouère ganté est inconnu, où les princes italiens qui ont leurs cellules à Mazas n'ont pas droit de cité... au concert de la Villette. Là, l'exquise Parisienne, avec sa verve endiablée, son sourire jeune et rose, sa gaieté communicative, sa joliesse de petite et bonne fée, obtint un succès immense, et c'est de là qu'elle fit uù pas de géant, de la Villette aux Champs-Elysées, en s'arrêtant aux Pardès, nom mystérieux dont sons demandons la traduction.

Sur sa nouvelle scène, la mignonne Charlotte fait chaque soir une large moisson de bravos, avec des choses de grand art, comme la Cantinière sentimentale(!),le Roi des Pistons. (::), le Pioupiou de Paris (!!!) et autres bijoux de même marque.

Mais qu'on n'aille pas surtout croire que Charlotte Gaudet à l'oreille complaisante à tous les madrigalifères. Ce serait une grave erreur.

Elle rêve l'opérette, et certainement nous la verrons un jour sur une scène du boulevard, avec un rôle important. Eu attendant elle rentre chaque soir à Saint-Ouen, sous la conduite austère do sa mère chérie. Et quand, vers le milieu de la nuictée, la blonde Phébé vient glisser sa grimace sous les rideaux de la fenêtre, elle aperçoit, dans la couche virginale, Charlotte sommeillant, calme, souriante et seulette, avec son auréole de cheveux d'or qui la font ressembler à une sainte des verrières gothiques.

Quand je vous disais que c'est une étoile, la seule à qui je voudrais brûler de l'encens si j'étais astronome."

N.G. (Source : Gallica/BnF)