Concert de la Scala issu de l’Album théâtral n° 20 [août 1874]

Marie Bosc

(Iconographie et texte de Claire Simon-Boidot que nous remercions pour la somme de précisions fournies et sourcées)

ée le 6 août 1840 à Paris, de parents originaires de Montpellier (34 - Hérault) [1], cette chanteuse légère possédait une voix de soprano qui lui a valu des engagements au théâtre comme au café-concert.

Une de ses biographies donnée par Albéric Menetière en 1870 [2] nous apprend qu'elle perd son père vers l'âge de neuf ans et est élevée au couvent jusqu’à ses quinze ans. À sa sortie, elle est en apprentissage comme couturière puis repriseuse de cachemires. Vers seize ans, elle entre au Théâtre Lyrique comme coryphée.
Là, elle se régalait d’écouter Mme Miolan - Carvalho. Le directeur, M. Carvalho, finit par lui confier le rôle de Fanchette dans les Noces de Figaro. Mais, au bout de soixante représentations où elle avait correctement tenu son rôle, il la paya soixante francs, soit
un franc par soirée. Une misère, une insulte ! qui la décida à abandonner ce théâtre et son directeur.
Bien qu’elle ait été auditeur au Conservatoire quelques mois, elle ne fut pas embauchée sur une autre scène lyrique et se décida à passer au café-concert.

Elle débuta en 1859 au Café de France (Goubert directeur), puis au Cheval Blanc [3] . Elle y
resta trois ans, puis cinq ans à l’Alcazar [4], puis elle fut engagée à l’Eldorado, avec des
passages dans d’autres concerts, comme les Folies Dauphine, en 1861. Elle eut
comme professeur Bussine de l’Opéra Comique [5]. Le résultat enthousiasme
Mennetière : "C'est incontestablement une artiste consommée et savante. A une voix
souple et étendue, d’une exquise pureté et d’un registre élevé, elle unit le don natif du goût et une méthode excellente. A ces qualités de virtuosité, elle ajoute le sentiment
vrai du morceau. Pleine d’expression, elle détaille à ravir les nuances exquises de la
musique ; passant avec une merveilleuse facilité des notes de poitrine à celles de tête,
qualité rare chez une chanteuse légère. A une grâce simple et modeste, qui s'ignore
pour ainsi dire, elle joint une physionomie des plus sympathiques
" [6]

Une autre biographie, parue dans Le Foyer [7] en 1866, confirme qu’elle fut élève de Bussine et décrit son art : "Sa voix est gracieuse et agréable ; elle ne fanatise pas, mais elle captive ; elle n’émeut pas, mais elle charme" et en résume la substance : "Marie Bosc représente, en un mot, le côté poétique du café-concert au même degré que Thérésa en représente le côté réaliste." [8] Son parcours se confirme aussi : Café de France en 1859 (direction Goubert, une quinzaine de jours), avant de passer au Cheval Blanc [9] pendant trois ans, puis à l’Alcazar, [10] cinq ans, et enfin à l’Eldorado. On lui connaît des succès dans des pièces comme l’Ave Maria de Gounod, qui montre qu’elle continuait d’avoir de la nostalgie pour ce
registre, qui ne risquait pas de plaire au-delà du raisonnable au café-concert ! C’est peut-être ce qui explique le peu de partitions qui nous soient parvenues de ses créations. Dans la vie, elle cherche la discrétion et non une publicité tapageuse, mais elle a de la répartie et mouche facilement ses consœurs. Les biographes la dépeignent dévouée à sa mère, avec qui elle vit. Ils passent sous silence le fait que, en 1862, à 21 ans, elle eut un enfant hors mariage, ce qui ne semble pas avoir ralenti sa carrière mais l’obligeait à assurer un revenu aussi régulier que possible.
Quand on regarde de plus près, en consultant la presse ancienne, on
constate que son parcours est moins linéaire et que ses engagements se croisent
parfois, au lieu de se succéder strictement comme le prétendent ses biographes de
1866 et 1870.

Elle intervient au Théâtre Lyrique en 1859 : "Mlle Marie Bosc, du Théâtre Lyrique a dit, avec une voix d’une pureté excessive, avec un brio et un entrain satisfaisants, la Couronne de l’artiste et l’air du deuxième acte des Dragons de Villars. Bravos, fleurs et rappels, rien ne lui manqué." [11] Le 14 novembre de la même année, elle chante à la salle Barthélémy Jeanne Pray de Bordire et La fille du régiment d’Adam [12].

En 1864, elle chante à Néris (les Bains. 03 - Allier)) : "On en trouve encore d’autres
[éléments de distraction], qui ont l’immense avantage de charmer sans fatigue, et
dont tout le monde peut profiter. Je veux parler de ces délicieuses soirées
musicales que donne M. Michiels, premier violon du théâtre des Italiens, en
compagnie de quelques artistes de mérite : Mlle Bosc, dont la voix souple et
charmante a su se faire applaudir maintes fois à juste titre"
[13].

Dans un article daté du 24 juillet 1866, Georges Maillard rapporte : "Une des
cantatrices les plus sérieusement méritantes des cafés-concerts de Paris, c’est une
jeune élève de Bussine, mademoiselle Marie Bosc dont le talent réel est connu et
apprécié du public qui fréquente l’Alcazar des Champs Elysées. Mademoiselle Bosc
est une petite personne, mince et frêle, si délicate, si mignonne, qu’on s’étonne de
l’entendre déployer une voix si large et si puissante."
[14]

En octobre 1866, sa présence à l’Alcazar est d’autant plus appréciée que Thérésa, l’étoile du lieu, est malade [15]. "Mademoiselle Marie Bosc a chanté cette semaine avec son succès accoutumé, les grands airs du répertoire de l’Opéra et de l’Opéra-Comique ; voix toujours aussi fraîche et excellente méthode. Mademoiselle Marie Bosc a tout ce qu’il faut pour réussir." [16]
Pourtant, l’Orchestre place ses débuts à l’Eldorado dès le 22 mai 1866. Elle y chante Violetta, Mireille, le Caïd, Guillaume Tell, tous des airs d’opéra, Mireille ayantété créé par... Mme Carvalho ! Le chroniqueur de l’Orchestre en fait l’éloge : "Mlle Marie Bosc est une cantatrice de la haute école, la Fille de l’Air du chant ; elle franchit les plus difficiles obstacles sous l’habile direction de M. Bussine, un maître." [17]
En 1867, par deux fois, elle fait la "une" de la Revue le Café-concert.

Café-concert du 14 avril 1867

Café-concert du 23 juin 1867

Comme beaucoup d’artistes, il lui arrive de participer à des concerts de charité,
comme en août 1867, où elle se produit à la salle de l’Athénée et chante l’air du Pré
aux clercs d’Herold au profit de l’Œuvre de N.-D. de Consolation. [18]

Marie Bosc doit ensuite alterner ses engagements entre l’Alcazar et
l’Eldorado :
En Effet, en avril 1868 : "La troupe féminine [de l’Alcazar] compte toujours parmi ses étoiles Mme Marie Bosc qui vient d’ajouter un fleuron à sa couronne artistique avec le grand air des Capulets et des Montaigus, de Ballini." [19] Tandis qu’en juin 1869, à l’Eldorado, elle se prépare à interpréter La Captive. [20] En décembre, toujours à l’Eldorado, à son programme : Pierre de Médicis, La magicienne, Chant d’amour, Verse l’oubli, Fleur de printemps, Champagne . [21]
Début 1870, paraît l’ouvrage de Mennetière sur les cafés-concerts. L’opuscule,
contrairement à ce que laisse croire son titre, ne fait pas une revue des étoiles cafés-
concerts mais se contente de présenter les membres de la troupe de l’Eldorado, étoiles
et débutants ! Timothée Trimm, qui en a écrit la préface, en publie également une
revue. Si on doit le croire, il a produit la préface sans avoir lu l’ouvrage, ce qu’il a fait
avant d’en établir la critique... Sous sa plume, on lit de nouvelles qualités concernant
sa voix :
Février 1870 : revue de l’ouvrage de Mennetière : "Je trouve, dans le volume, la
silhouette d’une véritable chanteuse, Mlle Marie Bosc. Elle offre une rareté qu’on ne trouverait pas parmi les cantatrices de nos théâtres subventionnés. C’est un soprano
qui a un médium superbe. Nillson a le contre-fa, mais de médium... point, - pas
davantage telles ou telles étoiles de nos étoiles de la scène, Mlle Marimon en tête. On
appelle leur voix, en termes musicaux, un soprano aigu... aigu est le mot... Le livre
nous montre, à 16 ans, Mlle Marie Bosc, choriste au Théâtre-Lyrique, écoutant dans
les coulisses avec une dévotion toute artistique... quand Mme Carvalho chantait...
estimant que cet exemple était préférable aux leçons de tous les conservatoires du
monde." [ 22]

En mai 1870, Marie Bosc est toujours à l’Eldorado et chante "Cœur brisé", "Soir
d’été"
, "Ma coupe", "Je bois", "Tyrolienne du printemps" [23]. Elle y chante encore en juin et juillet (sans détail du programme) mais ne semble pas intervenir jamais dans le jeu
des saynètes.

Après les épisodes de la guerre de 1870 et de la Commune de Paris, on la
retrouve en septembre 1871, à l’Alcazar d’été, où elle chante : "Le printemps", "Le chant
de l’amour"
, "Les Roses"(valse d’Olivier Métra), "Le hautbois", "Légère hirondelle", "Le pré aux clercs", "Pierre de Médicis" . [24]
décembre, elle a suivi l’Alcazar, dans sa version d’hiver [25], et y interprète Patria et La
Courtisane . [26]
Néanmoins, elle intervient le 17 décembre 1871 au concert Valentino :
"Mercredi prochain 13 courant, par extraordinaire, concert vocal et instrumental
dans lequel on entendra Mlle Marie Bosc, première chanteuse de l’Alcazar. Tous les
samedis, bal masqué" [27].

Son véritable contrat demeure cependant à l’Alcazar d’hiver , comme l’assure
son programme de janvier 1872 : "Les échos du soir", "Caresse", "Air du rossignol", "La
Boîte de Pandore"
, "Légère hirondelle", "Monsieur Nicolas", "C’est si peu" [28]. En mars, son répertoire se renouvelle bien : "Fandango", "Air du Rossignol", "Le Renouveau", "Légère hirondelle", "le Bouquet de violettes". [29] Comme ailleurs, elle ne joue pas les opérettes.
En juin 1872, son programme évolue : "Perles et diamants", "Hébé", "les Noces de Jeannette", "Ernani", "la Zingara", "Pepita la Bella", "la Blonde Alsace" [30]. Où passe-t-elle l’été ? La presse ne le dit pas. En septembre, elle chante Le maître de chapelle en duo
avec M. Caillot. Ses chansons sont par ailleurs légèrement renouvelées : "Perles et diamants", "les Noces de Jeannette", "Ernani", "Les cent vierges", "Les Lilas".
En 1872, Constantin décrit ainsi Marie Bosc, qu’il situe à l’Alcazar : "Marie
Bosc, gentil rossignol qui interprète les morceaux d’opéras nouveaux et les valses
d’O. Métra, de Marie de Beaucourt.
" [31] En septembre 1872, la presse le confirme :
"Mlle Bosc, la diva des Champs-Elysées, chante tous les soirs avec succès la
charmante sérénade du Page, tirée d’un opéra du maestro Avelino Valenti." [32]

La saison d’hiver 1872-73 ne semble pas se présenter sous les auspices de
l’Alcazar. En effet, on lit, dans la presse du 27 octobre : "Mademoiselle Marie Bosc,
la sympathique chanteuse, vient de débuter à la salle Valentino. L’air du Pré aux
clercs et la valse des Cent Vierges ont été couverts d’applaudissements. Il est vrai
que la célèbre divas chanté avec une virtuosité qui la place au premier rang des
cantatrices les plus remarquables." [33] On la retrouve dans ce concert en janvier 1873 : "La charmante cantatrice, Mlle Marie Bosc, est toujours la favorite des
concerts Arban."
[34] La revue l’Orchestre n’évoque pas la chanteuse de toute l’année
1873. [35] On peut cependant émettre l’hypothèse que le passage à Valentino n’a été
qu’une prestation "en passant" puisque la revue le Vert-vert, la place encore à
l’Alcazar en février 1873 où elle chante : Les roses (air suédois), Pendant le bal
(valse), le Bal masqué, Pierre de Médicis (air), l’Echo, Sérénade du page, "les Cent
vierges"
[36] et ce jusqu’en avril. Son destin à l’été 1873 est inconnu.
En revanche, les bruits de coulisses de septembre évoquent la possibilité que
Marie Bosc parte chanter en Italie : "Une troupe d’artistes français doit aller cet
hiver à Rome pour jouer la comédie et l’opérette. Parmi les noms qui figurent dans la
nouvelle compagnie, nous avons remarqué ceux de Mmes Clarence, Raucourt,
Minelli, Marie Bosc, Faye, M. Chambéry." [37]

Notes :
[1] Bien qu'originaires de Montpellier (34 - Hérault), cette famille Bosc n'a pas de parenté avec Auguste Bosc ( fiche biographique précédente).
[2]
Albéric Menetière, Les étoiles des café-concert, Paris, 1870, p. 24-37.
[3] La Chanson (5 février 1863), [p. 4]
[4] D’après les numéros du Vert-vert, elle se produit à l’Alcazar en 1866, 1867 et jusqu’à mars 1868.3
Elle passe à l’Eldorado au 1er février 1869
[5] Difficile aujourd’hui de savoir de quel Bussine parle Mennetière. En effet, deux frères ont été
artistes lyriques (barytons) et professeurs de chant. Compte tenu des dates, il s’agirait plutôt de
l’aîné, à savoir Prosper Alphonse Bussine (Paris Ancien, 1821-Paris 5ème, 1881) que du cadet,
Romain Bussine (Paris Ancien, 1830-Paris 9ème, 1899).
[6] Albéric Menetière, Les étoiles des café-concert, Paris, 1870, p. 36-37
[7] Antonio Mariani, "Galerie artistique des cafés-concerts. Les étoiles. IV. Marie Bosc" dans Le
Foyer
, 13 septembre 1866, p. 5-6. (Gallica)
[8] Antonio Mariani, "Marie Bosc » dans Le Foyer (13 septembre 1866), p. 6.
[9] Par exemple : La Chanson (5-12 février 1863), [p. 4].
[10] Par exemple, : Europe Artiste (3 Janvier 1864), p. 2 ; Le Foyer, 23 octobre 1866, p. 5 ;
[11] L’argus méridional (2 octobre 1859), p. 3.
[12] L’Orchestre (15 novembre 1859), [p. 4].
[13] "Courrier. Néris, 17 août » dans Gazette des eaux (25 août 1864), p. 268.
[14] Coupure de journal conservée à la BHVP, cote 4 BIO 06049.
[15] Le Foyer (23 octobre 1866), p. 5.
[16] ROGER (Eugène), "Alcazar", dans Paris-Programme (4 novembre 1867), p. 1.
[17] L’Orchestre (26 mai 1866), p. 3.
[18] L’Orchestre (9 août 1867), [p. 4].
[19] Paris-Programme, 1 avril 1868, p. 1 (Gallica)
[20] L’Orchestre (14 juin 1869), [p. 3]
[21] L’Orchestre (29 octobre 1869), [p. 4].
[22] TRIMM (Timothée), "Les cafés-concerts » dans Le Petit Moniteur Universel (24 février 1870),
[23] L’Orchestre (12 mai 1870), [p. 4].
[24] L’Orchestre (21 septembre 1871), [p. 2 et 4].
[25] "Programme des spectacles du 13 décembre" dans Paris-journal, 14 décembre 1874, p. 4.25 (Retronews)
[26] L’Orchestre, (2 novembre 1871), [p. 3]
[27] La Chronique Illustrée (17 au 24 décembre 1871), p. 3.
[28] L’Orchestre (24 janvier 1872), [p. 4].
[29] L’Orchestre (25 mars 1872), [p. 4].
[30] L’Orchestre ( juin 1872), [p. 4].
[31] CONSTANTIN (Marc), Histoire des cafés-concerts, Paris, 1872, p. 92.
[32] Le Petit Journal (7 septembre 1872), p. 3.
[33] L’Indépendant Français (27 octobre 1872), p. 3.
[34] "Spectacles et concerts. Valentino" dans Le Tintamarre (19 janvier 1873), p. 7.
[35] Il faut cependant signaler que, pour une raison inconnue de nous, L’Orchestre tait souvent le
programme de l’Alcazar... Et si le concert est parfois évoqué en page 2 ou 3, son programme figure
rarement en page 4.
[36] Vert-vert (23 février 1873), p. 3.
[37] OSWALD (F.), "Bruits de coulisses » dans Le Gaulois (21 septembre 1873), [p. 4].

Y a-t-elle passé tout l’hiver ? On le lui souhaite ! Pourtant, dès janvier 1874 : " Valentino, avec son orchestre conduit par Arban, attire chaque soir une foule considérable. Les programmes offerts au public vont être encore plus attrayants par les auditions de Mlles Marie Bosc et Marie Boulanger." [38] Elle chante la "Valse des Cent vierges" de Lecocq [39] ainsi qu’en février. En mars : "C’était grande fête vendredi 20 mars, à Valentino ; tous les véritables amateurs de musique s’étaient donné rendez-vous dans la salle de M. Ducarre, à l’occasion du festival annuel d’Arabe. Rossini, Hérold, Halévy, Meyerbeer, Vieuxtemps faisaient, avec Arban lui-même les frais du programme, qui ne comptait pas moins de trois premières auditions et sur
lequel figurait la Société chorale des enfants de Lutèce, Mlle Marie Boulanger, M. Cantié, flûtiste, et M. Chavanne, cornettiste. Aussi, l’habile chef d’orchestre n’a-t- il eu qu’à se louer de l’empressement avec lequel le public s’est rendu à son invitation. Mlle Marie Bosc, qui avait promis son concours s’étant trouvée indisposée au dernier moment, a dû se faire remplacer. C’est Mlle Huet, une élève du conservatoire, qui a été chargée de cette mission artistique, et elle a chanté deux morceaux : "Il va venir » de La Juive et "Va, dit-elle » de Robert-le-Diable." [40]

Si l’on en croit le fait que Marie Bosc fait partie de la troupe qui inaugure la toute nouvelle Scala en mars 1874, on peut imaginer que ses passages à Valentino sont des engagements ponctuels qui viennent combler ses périodes sans engagement durable : "L’inauguration de cet établissement lyrique été un vrai succès. M. Vergeron, le directeur, a su former une troupe d’artistes excellents. Marie Bosc, Graindor et Arnaud sont les étoiles de ce café-concert, qui fera une concurrence sérieuse à l’Eldorado. » Le succès de la Scala est immédiat. La conception de sa salle, avec un toit ouvrant, est une bénédiction quand les beaux jours arrivent car il permet d’aérer la salle et rend plus supportable la fréquentation des fumeurs !
En juin 1874, "Perles et diamants", "le Chant de l’amour", "les Blés fleuris", "la Valse des
Cent Vierges"
, le grand air de "Pierre de Médicis", tels sont les principaux morceaux qui
méritent, à Mme Marie Bosc, de nombreux et sincères applaudissements"
. [42] A l’été
1874, sous la direction de Jules Javelot : "La Scala lutte victorieusement contre la chaleur [...] Mme Marie Bosc et M. Arnaud continuent à se partager les faveurs du public. Mme Marie Bosc chante avec beaucoup de succès grâce sa sa voix si fraîche et si harmonieuse, "la Chanson arabe", "la Valse du basilic", "Il est si doux d’aimer", "Où s’en vont-elles ?" [43] En août, selon l’Orchestre : "Le Chant de l’amour", "Les bavards","Où s’en vont-elles ?", "La chanson arabe", "Le Passant", "Aimé", "Le Hautbois", "Follenbray" [Folembray est un compositeur], "l’Absence", "la Chanson chinoise", "Galathée" [44]. "Mme Marie Bosc, avec sa voix fraîche, harmonieuse, bien timbrée, enlève tous les applaudissements de la salle." [45] En septembre, à son programme, déjà rempli, elle ajoute : "la reine des Savanes", "la Valse des passions", "la Valse de Schuloff" [46]]."Depuis le 1er octobre, la troupe de la Scala est au grand complet, et tous les soirs on applaudit au concert du boulevard de Strasbourg, MM. Arnaud, Victor, Bienfait, etc. Mmes Marie Bosc, Graindor, Philippo, Danna. Les intermèdes sont remplis par les frères Dorst, clowns, pantomimistes et danseurs." [47] En octobre elle ajoute à sa prestation :
"la Valse de Schuber" (sic) et "le Roi des eaux" [48]. Les louanges se suivent, qui vantent le
paradoxe de sa voix qui allie puissance et fraîcheur : "Mme Marie Bosc est une artiste de grand talent, sa voix fraîche, harmonieuse, bien timbrée, fait merveille dans "le chant de l’amour", "la valse des passions", "la chanson chinoise", "Aimez !" [49]
"Mme Marie Bosc, avec sa voix puissante et charmante, est adorée du public." [50]
"Mme Bosc avec sa voix chaude, sympathique et puissante, est adorée." [51]
La quatrième de l’Album théâtral détaille parfois son programme de chansons :
""Le Hautbois", "La valse des passions", "la coupe d’amour", "Joli berger", "Vive Bacchus", "Barque jolie" [52]. Cette dernière chanson "La charmante valse", "Barque jolie", chantée avec un grand succès tous les soirs à la Scala par mademoiselle Marie Bosc, vient de paraître chez l’éditeur Feuchot. Les auteurs, Marc Constantin et Victor Robillard, ne
pouvaient mieux confier leur œuvre qu’à la diva de la Scala, dont la voix magnifique est au-dessus de tout éloge." [53] Pendant deux ou trois mois, son programme de chansons ne change guère. En mars 1875, elle ajoute à son répertoire "Mignon", "les Noces de Figaro", "la Chanson de Sans-souci" [54]. Après le mois de mai 1875, on ne trouve plus Marie Bosc au programme de la Scala.

Peut-être profite-t-elle de l’été pour se reposer... Certaines de ses créations cependant, ont assez plu pour être citées en octobre 1875, parmi les éditions intéressantes : "Citons encore quatre morceaux de chant, dont Charles Lecocq a composé la musique et l’accompagnement pour piano : une berceuse, créée par Mme Marie Bosc aux concerts de la Scala : "Brises de l’Océan". L’auteur des paroles est A. Aubert." [55] On retrouve Marie au concert Valentino en novembre 1875 : "Loin de s’arrêter à ces prétentions d’un goût douteux, la salle Valentino – sans aspirer au suffrage du meilleur monde et du public le plus élégant – exhibe toutes les semaines de nouvelles romances. Elles ne sont pas toutes bonnes, loin de là. Nous mentionnerons cependant la Sans-Souci, musique de Villebichot, chanté par Mlle Marie Bosc, qui a de la voix et qui sait se tenir en scène, et le duo du Pré-aux-Clercs, enlevé par Lepers et Marie Bosc." [56] L’Orchestre en dit un peu plus : "Valentino. Les programmes de la semaine dernière seraient à citer depuis le commencement jusqu’à la fin si l’on voulait signaler tous les morceaux dignes de remarque. Forcés que nous sommes de nous restreindre, nous mentionnerons seulement la romance de"Joconde", de Nicolo, parfaitement dite par M. Lepers, "le Sans-Souci" de Tracy, musique de Villebichot, l’air de "La Juive" et l’air de grâce de "Robert-le-Diable",chantés pas Mlle Marie Bosc et le duo du Pré-aux-Clercs, tout à fait enlevé par les deux artistes" [57] . En novembre, la participation de Marie Bosc au concert vocal est détaillée : "Va, dit-elle" , air de Robert-le-Diable et "Le Sans-Souci", chanson de Villebichot [58] . "Les concerts Valentino sont toujours très suivis ; on y applaudit
chaque soir Mlle Marie Bosc, dont la belle voix remplit la salle. M. Dubouchet, comique de genre, vient de débuter ; il amuse beaucoup avec ses chansonnettes, et l’orchestre Deransart charme les auditeurs avec des programmes toujours nouveaux et dont l’exécution est parfaite"
[59] "Valentino. Le succès de Mlle Marie Bosc va toujours en augmentant et chaque soir le public fait une ovation à sa chanteuse favorite" [60].
A partir de cette date, les engagements de Marie Bosc sont plus difficiles à suivre. La revue L’Orchestre, en particulier, ne la cite plus jusqu’à septembre 1878.
Pourtant, elle ne disparaît pas du paysage, ni même du paysage parisien. En effet, en janvier 1876, on annonce un "Concert donné par la société d’Harmonie, avec le concours de Mlle Marie Bosc, 1ère chanteuse des principaux concerts de Paris et M. Fusier, 1er chanteur de genre de l’Eldorado de Paris." [61] Elle y chante : "le Hautbois", pastorale de Latour, "la Valse des cent vierges" de Lecocq, "les noces de Figaro" de Mozart, "les Bavards" d’Offenbach. Rien de nouveau, en somme, mais des classiques qu’elle maîtrise.
En juin 1876, Marie Bosc chante de nouveau à la Scala (direction J. Muller) :
elle y reprend : "Boléro", "l’Amour", "Où s’en vont-elles ?", "V’là l’printemps",
"Pomponnette", "ô ma charmante", "Folles pensées", "Où vas-tu jeune belle ?" Ainsi qu’en juillet et en août, où elle ajoute à sa prestation des titres dont certains sont des
classiques chez elle : "Quand se lève ton voile", "les Cent vierges", "Mets ton bonnet Madeleine", "Pierre de Médicis" [62] . En septembre, son répertoire s’accroît encore avec
"Nina" [63] En octobre, "Le pardon". [64] En novembre 1876, la revue des concerts indique
que "Marie Bosc est toujours la première chanteuse des concerts de Paris." [65] Son
répertoire varie peu : des chansons s’en vont, d’autres reviennent comme "Robert le
Diable"
. En décembre 1876, elle ajoute "L’Amour a vingt ans" [66] et "Enfant garde tes
larmes". [67]
En janvier 1877, "Marie Bosc soutient sa grande réputation et les
applaudissements du public le lui prouvent."
[68] Elle chante toujours à laScala. A son
répertoire bien connu, elle ajoute "Blidah".[69] En février, les chroniqueurs soulignent de
nouveau un fait qui n’échappe à personne au regard de son répertoire : "Mme Marie
Bosc est certainement la seule qui, dans les concerts de Paris, puisse chanter les
grand airs d’opéra ; aussi quel succès !" [70] Cela ne l’empêche pas de chanter des
choses plus légères : "Hébé", "L’heure des amours" [71], "Dormez ma charmante" [72]. Le 12 mars 1877, elle donne une matinée à Frascati [73]. A la fin avril, son contrat semble se
terminer. A cette même date, les éditions Ballot annoncent la publication de "Donnez
ma charmante" de Capet et Carel, musique de Paul Henrion [74]. C’est une coquille
pour "Dormez ma charmante", qu’on retrouve à la BNF sous la cote VM7-64596 et
dont la date de dépôt légal est 1877.

C’est en province que Marie Bosc s’en va, mais pas pour se reposer ! On la
retrouve au Pré-Catelan de Toulouse en avril 1877. Elle est décrite ainsi : "Marie
Bosc, célébrité de Paris." [75] .

Notes :
[38]
Journal officiel de la République Française, 30 janvier 1874, p. 871
[39] L’Orchestre (29 janvier 1874), [p. 4].
[40] DARM (H.), "Valentino » dans L’orchestre (27 mars 1874), [p. 2]
[41] ANéZO (Michel), "Thermomètre théâtral. Scala » dans Le Sifflet (22 mars 1874), p. 4.
[42] "Concert de la Scala" dans L’Album théâtral n° 12 (1874), [p. 2].
[43] Concert de la Scala » dans L’Album théâtral n° 20(1874), [p. 2].

[44] L’Orchestre (4 août 1874), [p. 4].
[45] Concert de la Scala » dans L’Album théâtral n° 23 (1874), [p. 2].
[46] L’Orchestre (30 septembre 1874), [p. 4].
[47] "Théâtres et concerts" dans Le Temps (28 octobre 1874)
[48] L’Orchestre (5 octobre 1874), [p. 4].
[49] L’album théâtral, n° 30 (13 au 19 octobre 1874), p. 2
[50] L’album théâtral, n° 39 (décembre 1874), p. 2.
[51] L’album théâtral, n° 49 (février 1875), [p. 3].
[52] L’album théâtral, n° 41 (janvier 1875), [p. 4].
[53] Le Sifflet (24 janvier 1875), p. 4.
[54] L’album théâtral, n° 53 (mars 1875), [p. 4].
[55] La Comédie (17 octobre 1875), p. 4.
[56] "Le courrier des théâtres" dans Le Bien Public (29 novembre 1875), p. 3.
[57] L’Orchestre (24 novembre 1875), [p. 3].
[58] L’Orchestre (24 décembre 1875), [p. 4].
[59] Le Charivari (15 déc. 1875), p. 4.
[60] L’Orchestre (30 décembre 1875), [p. 3].
[61] Le Guetteur de St Quentin et de l’Aisne (9 janvier 1876), p. 2.
[62] L’album théâtral, n° 33 (août 1876), [p. 2].
[63] L’album théâtral, n° 37 (septembre 1876), [p. 2].
[64] L’album théâtral, n° 41 (octobre 1876), [p. 2].
[65] L’album théâtral, n° 45 (novembre 1876), [p. 1].
[66] L’album théâtral, n° 48 (décembre 1876), [p. 4]
[67] L’album théâtral, n° 51 (décembre 1876), [p. 4].
[68] L’album théâtral, n° 2 (janvier 1877), [p. 2].
[69] L’album théâtral, n° 2 (janvier 1877), [p. 4].
[70] "Chronique. Concert de la Scala" dans L’album théâtral, n° 8 (mars 1877), [p. 2].
[71] "Chronique. Concert de la Scala" dans L’album théâtral, n° 8 (mars 1877), [p. 4].
[72] L’album théâtral, n° 12 (mars 1877), [p. 4].
[73] Le Petit Moniteur Universel, 12 mars 1877, p. 3 et La France, 11 mars 1877, p. 3.
[74] Le Sifflet, 1er avril 1877, p. 4.
[75] La Dépêche, 12 avril 1877, p. 3, idem, 23 avril 1877, p. 3


Elle y est encore en mai : "Grand succès des quatre artistes en représentation, de Mlles Marie Bosc et Kaiser, et de MM. Bourgès et Nicol." [76] et "grand succès des cinq artistes en représentation, de Mlles Marie Bosc et Rivière, et de MM. Bourgès, Nicol et Bruet." [77] Elle y glane encore le succès la première semaine de juin . [78]
Elle rentre à Paris à l’automne, sans qu’on connaisse bien ses engagements,
même si, toutefois : "Au Moulin de la Galette, samedi 6 octobre prochain [1877],
concert, avec le concours de MM. Kaiser, Elise Faure, Marie Bosc, Bourgès, Doucé.
Nombreux intermèdes, bal de nuit." [79]
C’est en province qu’elle apparaît de nouveau, en février 1878. Ainsi se présente l’annonce : "Alcazar de Dijon". Le 20 février 1878 : adieux de Mlle Amélie Veuillet, comique excentrique. Jeudi 21 février, première représentation de Mlle Marie Bosc, première chanteuse de la Scala." [81] "Alcazar de Dijon. Aujourd’hui 22 février 1878, Continuation des représentations de Mlle Marie Bosc, première chanteuse de la Scala." "Alcazar de Dijon. Aujourd’hui, 21 mars 1878, avant-dernière représentation de Mlle Marie Bosc, première chanteuse de la Scala." [82]
Son parcours est ensuite inconnu jusqu’au moment où elle réapparaît à Paris, ayant trouvé un engagement durable au Grand Concert Parisien, faubourg Saint-Denis.
L’Orchestre, en septembre 1878, informe : "De grandes surprises sont ménagées pour le 1er septembre. En première ligne, je citerai les débuts de Mlle Marie Bosc, qui est tout bonnement une des premières cantatrices des cafés-concerts. Si Marie Bosc avait voulu parler en scène, elle serait à l’Opéra-Comique depuis dix ans, mais elle ne l’a pas voulu." [83] "Marie Bosc continue ses représentations avec le même succès". [84] Elle y chante avec Demay et La Bordas, dont on ne peut pas dire qu’elles possèdent le même style, ni les mêmes talents vocaux... En octobre 1878, son programme est alors : "Minuit à Venise", "Laisse-moi t’aimer", "Les blés fleuris", "La
chanson du ruisseau"
, "Le Rossignol n’a pas encore chanté", "Nina",
"La fête à Séville"
.[85]
"Marie Bosc est accueillie par d’unanimes bravos." [86] En novembre, elle ajoute à son programme : "Dites la jeune belle", "Le Chemin des amoureux", "Charles VI". En
décembre 1878 : en plus de ses chansonnettes, auxquelles elle ajoute les titres"Medjina" et "Minuit à Venise", elle joue dans la revue SGDG. [87] Cette revue [88]est de M. A. Lemonnier pour les paroles et de MM. Jules Javelot et Levoulle pour la musique. Marie Bosc y joue le premier prix de l’exposition. Le chef d’orchestre du Concert Parisien était alors Massagé.
"La pièce est d’ailleurs bien jouée et surtout bien chantée par Mmes Riguet-Lemonnier
[sic pour Riquet-Lemonnier ndlr], Marie Bosc, Alida Perly, une artiste dont j’ai oublié le nom mais qui a crânement enlevé le rôle de la loterie nationale [juste Mme Demay ! ndlr], la petite qui joue la revue [Blockette ndlr], l’autre petite qui singe Paola Marié ; puis le compère Jobly [pour Jably, ndlr], Brigliano, etc. Tout est joliment costumé, présenté, et dans un décor brossé, nous a-t- on dit, par un artiste de la troupe." [89]
La revue est encore jouée en janvier 1879, où Marie poursuit son programme
de chansons, auxquelles elle ajoute : "Fleurs d’Alisa", "Jeune fille, jeunes fleurs".[90] Elle
se poursuit encore au mois de février, où elle augmente son registre des chansons
suivantes : "Viens fêter le matin", "ô ma charmante", "Entrez, printemps", "Balkaïra". [91] En mars, la revue a cessé. Marie chante également "Hébé" et "Fior d’Amore". [92] En avril
1879, elle poursuit la saison toujours au Grand Concert Parisien, où elle ne prend pas
part aux comédies-vaudevilles mais chante toujours plus : à l’ensemble des titres
précité, elle ajoute la "Valse des passions", le "Chevalier Gaston" [93] et "La Bergère de
Barbizon"
. [94]
Marie Bosc perd sa mère en mai 1879, à l’âge de 63 ans. Son fils, qui
deviendra musicien, a alors 17 ans.

Bien que l’Orchestre n’évoque pas la présence de Marie Bosc la saison
suivante au Concert Parisien, on peut avancer qu’elle a rempilé puisqu’elle participe à
la revue du concert en décembre 1879 : "Rien d’aussi facile que de faire une revue ;
mais rien de plus difficile que d’en faire une bonne. Sur dix pièces de ce genre, on en
trouve huit qui font défiler devant le spectateur des actualités groupées sans
originalité, débitant des couplets sans rime, faits à la vapeur, et très capables de vous
en donner, pour peu qu’on soit nerveux. Tel n’est pas le cas de la revue du Concert Parisien : les scènes amusantes, les scènes patriotiques sans exagération de chauvinisme, les scènes de sentiment, sont marquées au coin du bon faiseur ; entremêlez le tout de mots d’esprit de bon aloi, et vous aurez une idée de
P’rapluie ! P’rapluie ! C’était la première fois que nous entrions au Concert Parisien, et nous
étions loin de nous attendre à trouver une troupe aussi complète et aussi homogène.
M. Bienfait, le compère de la Revue, est un comique de beaucoup de talent [...] la
gentille Albertine Favre [...] Mmes Bordas, Marie Bosc, Demay, Perly, MM. Reval,
Reste [sic pour Teste, ndlr], Hervier, ont eu leur bonne part de succès, sans oublier
M. et Mme Alfred, très amusants dans leurs danses de caractère. En résumé,
excellente soirée et grand succès d’auteurs et d’artistes."
[95]
Il est probable que l’engagement de Marie Bosc court jusqu’à la fin de la
saison d’hiver (avril 1880). Ses contrats deviennent ensuite plus épars et moins
faciles à suivre, même si on la suit encore en province au cours de l’année 1880.
En août et en septembre 1880, elle se produit Salle du Cirque de Troyes : "Ce
soir, représentation de Mlle Marie Bosc, premier sujet de l’Eldorado, de la Scala et
de l’Alcazar de Paris. Représentation de M. Laforgue, baryton."
[96] "Ce soir,
vendredi, immense succès de Mlle Marie Bosc, 1er sujet des concerts de Paris, qui se
fera entendre dans ses dernières créations. Débuts de M. Laforgue, baryton. Un
homme sur le gril, vaudeville. Demain, samedi : Une femme qui mord, vaudeville.
" [97]
Tous les jours, le vaudeville change. Un incident vient marquer les chroniqueurs le 10
septembre : la proximité du cirque et de la salle de concert est telle que les cris des
animaux couvrent ceux de la chanteuse ! "Le cirque est totalement masqué par la
ménagerie Salva. Dernièrement, Marie Bosc chantait une de ses plus délicieuses
créations ; tout à coup, une musique épouvantable se mit à couvrir le pizzicati de
l’orchestre et la voix de l’artiste. Je ne sais si les oreilles des administrateurs de la
ville sont assez développées pour saisir quelques nuances musicales, mais au moins
je leur suppose assez d’intuition pour comprendre qu’un directeur de concert, patenté
et contribuable, n’a nullement besoin, pour ses artistes, de l’accompagnement obligé
de coups de révolver, de rugissements de lions et d’éclats de rires de hyènes."
[98] Le
dimanche 12 septembre, c’est la clôture annuelle dont le programme est indiqué :
Marie Bosc se produit une fois en première partie, où elle chante la ballade de
Charles VI (Halévy) et une fois en deuxième partie, où elle interprète "Les cigales", une
romance de Doria. [99]

Marie poursuit son tour de province puisqu’on la trace à l’Alcazar lyrique de
Marseille
en novembre 1880 : "Spectacles du 11 novembre. Alcazar. A 8h, concert.
Représentations de M. Arnaud, comique en tous genres des concerts de Paris. Débuts
de Mlle Marie Bosc, de l’Eldorado, et des frères Nathal’s, acrobates. Pantomimes."
[100]
Les représentations se poursuivent en décembre 1880 : " Tous les
soirs, brillantes représentations du joyeux et inimitable comique
Arnaud ; Mlle Marie
Bosc, de l’Eldorado de Paris ; Mlle Worton, chanteuse à diction de la Scala de
Paris ; Rouffe et toute la troupe mimique ; Pongo, l’homme-singe, dans ses amusants
exercices."
[101]Le comble est peut-être que, à la même date, Mme Miolan- Carvalho
chante avec le concert Carvalho au Grand Théâtre des Nations de Marseille... [102]
A cette époque, Marie Bosc, que la presse continue d’appeler "Mlle Marie
Bosc » a plus de 20 ans de carrière et 40 ans. Les chanteuses de cet âge, mariées ou
non, sont plutôt appelées "madame"...
En 1884, la presse l’a confondue, dans un procès en adultère, avec une autre
Marie Bosc : Marie Jeanne Bosc (ou Bosq), sous prétexte que le jugement avait lieu
lieu le même jour que celui de Gustave Chaillier ! [103] En revanche, plus de trace d’une
éventuelle production artistique, mais il faut dire que la presse spécialisée est
inexistante dans l’offre d’internet pour la période de 1880 à 1890.
Quelques articles, qui reviennent sur les premières années du café-concert
après sa libéralisation de 1867, la citent toujours. Marie Bosc y est décrite comme
"une chanteuse légère digne de tenir le premier rang dans un théâtre lyrique." [104]
Marie Bosc se marie en1890, et s’éteint deux ans plus tard, le 20 février 1892 à
Gentilly, à l’âge de 51 ans. La presse ne fait pas mention de son décès ; aucune
nécrologie, à ma connaissance, n’est parue.
Si l’on devait, en quelques lignes, résumer la carrière de Marie Bosc, on
pourrait dire d’elle qu’elle a eu le malheur d’arriver sur la scène lyrique en même
temps que Miolan- Carvalho ou d’autres sopranos. Dans le café-concert, elle s’est fait
remarquer par une voix puissante, maîtrisée et fraîche. Les grands airs d’opéra ont eu
sa préférence, ainsi que les romances, les valses, les bluettes et quelques chansons
exotiques. Si quelques partitions sont parvenues de ses créations, en revanche, aucune
affiche de concert conservée ne lui est dédiée, ni en vedette ni comme membre de la
troupe. De fait, elle a souvent un programme de chanson important mais ne joue jamais les comédies en un acte. Elle a tenté d’exister au café-concert faute de pouvoir
faire carrière sur une scène lyrique. Si son talent est applaudi sans réserve partout où
elle passe, elle reste inclassable et son unicité dans le monde du café-concert la
montre surtout solitaire...


Notes :
[76]La Dépêche, 9 mai 1877, p. 3.
[77]La Dépêche, 19 mai 1877, p. 3.
[78] La Dépêche, 7 juin 1877, p. 3.
[79]La Patrie, 3 octobre 1877, p. 4.
[80] Le Progrès de la Côte-d’Or (20 février 1878), p. 3.
[81] Le Progrès de la Côte-d’Or (22 février 1878), p. 2.
[82] Le Progrès de la Côte-d’Or (21 mars 1878), p. 3.
[83] E.M. "Grand concert parisien » dans L’Orchestre (1er septembre 1878), [p. 2].
[84] L’Orchestre (29 septembre 1878), [p. 2].
[85] L’Orchestre (25 octobre 1878), [p. 4].
[86] L’Orchestre (26 octobre 1878), [p. 2].
[87] L’Orchestre (29 décembre 1878), [p. 4].
[88] Cet acronyme signifiait "Sans Garantie Du Gouvernement ».
[89] STRAPONTIN, "Les spectacles parisiens. S.G.D.G. » dans L’Estafette (30 novembre 1878), p.3
[90] L’Orchestre (31 janvier 1879), [p. 4].
[91] L’Orchestre (20 février 1879), [p. 4].
[92] L’Orchestre (15 mars 1879), [p. 4].
[93] L’Orchestre (9 avril 1879), [p. 4].
[94] L’Orchestre (19 avril 1879), [p. 4].
[95] TIM-TOM-JACK, "Les premières représentations. Concert parisien. P’rapluie ! P’rapluie !
Revue en trois tableaux, de MM. E. Hermil et A. Numès » dans Le Petit Caporal (7 décembre 1879), p. 3.
[96] L’Avenir républicain [Troyes] (27 août 1880), p. 3.
[97] L’Avenir républicain [Troyes] (28 août 1880), p. 3.
[98] "A travers les foires » dans L’Avenir républicain [Troyes] (10 septembre1880), p. 3.
[99] L’Avenir républicain [Troyes] (11 septembre 1880), p. 2.
[100] Le Petit Marseillais (11 novembre 1880), p. 3.
[101] La Vedette (5 décembre 1880), p. 70.
[102] Idem.102
[103] Par exemple, L’Echo de Paris, 29 décembre 1884, p. 3.
[104] NIELEMON, "A propos des cafés-concerts » dans Le Gaulois (15 août 1887), p. 3


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