BIO-EXPRESS


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T


es informations dont nous disposons sont quelques fois très succintes et ne nous permettent pas vraiment de réaliser une fiche biographique conventionnelle, ou alors, il s'agit de quelqu'un ayant eu un rapport épisodique à la chanson. Aussi, nous ajoutons cette série de pages (en ordre alphabétique) pour diffuser les quelques renseignements que nous possédons sur les personnages ne faisant pas l'objet d'une Fiche biographique...






 Taylor, Isidore Justin Séverin, Baron Taylor

né le 14 juillet 1789 à Bruxelles et mort le 6 septembre 1879 à Paris 10e, est un sénateur, membre de l'Institut, dramaturge, homme d'art et philanthrope français, pionnier du mouvement romantique.
Destiné à la carrière militaire, Isidore Taylor prépare l'École polytechnique mais abandonne rapidement ses études et s’oriente vers le Collège de France, et suit des leçons d'art. En 1818, il entreprend la rédaction, avec Charles Nodier, d'une série de volumes sur différentes régions françaises, dont la publication s'étale sur soixante ans.
En 1813, il s’engage dans l’armée et poursuit ses activités artistiques et littéraires pendant qu’il est lieutenant dans la Garde royale sous la Restauration.

Sa carrière militaire s’est achevée sur la campagne espagnole de 1823, au cours de laquelle il a fait preuve d’une grande bravoure.
Dans les années 1820, il a écrit et traduit de nombreuses pièces pour le théâtre, auquel il a toujours manifesté une grande considération. Il a traduit notamment avec succès le célèbre drame de Maturin, toujours avec Charles Nodier, Bertram, or The Castle of St. Aldobrandd. En 1821, il est, avec Langlois et Ozou, au nombre des créateurs du théâtre Panorama-Dramatique, dont il obtient le privilège auprès du Roi pour Ozou7. Il en est l’un des administrateurs pendant les deux ans que ce théâtre survit. Il collabore également aux journaux et les revues de critique d’art.

En 1825, alors que la Comédie-Française était au plus bas, il a été nommé commissaire royal de ce théâtre et, en moins de cinq ans, en a rétabli la prospérité et l’influence3. De 1831 à 1838, il administre de nouveau la Comédie-Française, où on lui doit la renaissance du Mariage de Figaro. Romantique convaincu, il ouvre la porte au mouvement romantique et prend une part active à la « campagne des Hugolâtres ». Il profite de ses fonctions pour mettre à la scène Henri III et sa cour d'Alexandre Dumas, puis Hernanie et Marion Delorme de Victor Hugo3. Lorsque Le roi s'amuse est interdit en 1832, Hugo intente un procès au Théâtre-Français en espérant garder l'amitié de Taylor.

Sa passion pour l’archéologie l’a conduit en Égypte pour acquérir des monuments. Nommé, par ordonnance royale du 6 janvier 1830, commissaire du roi auprès du Pacha d’Égypte pour négocier la cession des obélisques de Thèbes, et faire transporter en France l’aiguille de Cléopâtre, dont le principe avait été accepté par Charles X, le 25 novembre 1829. Chargé de recueillir en Égypte des objets d’art et d’antiquités, destinés à enrichir le Musée Royal du Louvre, un crédit de 100 000 fr. ayant été ouvert pour faire face aux frais de sa mission. On lui a également confié divers présents destinés à être offerts à Méhémet Ali et à son fils. Transporté à Alexandrie par le brick le Lancier, il est parvenu à ramener l'obélisque de Louxor, en vue de son installation à Paris, en dépit des quelques moments d’incertitude suscités par les changements politiques de pouvoir dus à la Révolution de 1830.
Nommé inspecteur général des Beaux-Arts, en 1835, il est chargé par Louis-Philippe d'acquérir des tableaux en Espagne, qui permettront l'ouverture de la Galerie espagnole du musée du Louvre en 1838. Ayant reçu le titre de baron de Charles X, par ordonnance du 28 mai 1825, il a été confirmé dans le titre de baron héréditaire, par lettres patentes du 4 mai 1870
Il voyage beaucoup, parcourant le monde, l’Europe et surtout la France, collectionnant des œuvres d’art pour les musées français.
En 1836, cet obélisque de Louxor est enfin érigé sur son piédestal, place de la Concorde.
Il fonde plusieurs associations pour aider les artistes et les écrivains :
les artistes dramatiques (1840),
les artistes musiciens (1843),
les artistes peintres, sculpteurs, architectes, graveurs et dessinateurs (1844),
les inventeurs et artistes industriels (1845).






1906 - Edmond Teulet avec Madame Richard
interprétant "Les deux Roses"
( dont il a écrit les paroles)

 Teulet, Edmond

23 février 1862 / 22 février 1934

Selon Léon de Bercy dans Montmartre et ses chansons, Paris 1902 :

De même que Trimouillat présenta au lecteur des Chansons et Monologues illustrés son camarade Lemercier, celui-ci, à son tour, écrivit en ces termes la biographie de Teulet :

"Edmond Teulet est né à Paris, le 23 février 1862.

"Ce fut à la Lyre Bienfaisante ? société chansonnière qui servit de tremplin à presque tous les ma?tres actuels du couplet, voire même à quelques chansonniers du Chat Noir ? que Teulet chanta sa première oeuvre, La Jeune Fille au Jupon bleu. Il avait composé la musique de cette romance, mais il ne s'intitula pas compositeur pour cela. Il préféra mériter le titre de chansonnier en écrivant : Pauvre Suzanne, La Chanson du Poète, La Bouquetière, Chanson de Printemps, L'Hiver est dur au pauvre Monde, Chanson du Vieux Temps, Les Robes, La Nièce, Les Yeux, La Chanson de Pierrot, etc..., et justifier son titre de poète en rimant : Fripouille, ?ufs de Pâques, En pleine Folie, Jeanne d'Arc, etc., cultivant ainsi, avec persévérance, un genre malheureusement tombé, de nos jours, en désuétude, et faisant entrer dans ses oeuvres toute son â me de poète romantique.

"Il publia un premier volume : Fleurs d'Ignorances, aujourd'hui épuisé, pour lequel le chansonnier Eugène Baillet avait écrit une préface pleine d'encouragement. Son deuxième volume,La Chanson du Grillon, justifia les prévisions du ma?tre. Cette fois, une délicieuse préface de Félix Pyat servait merveilleusement de prélude à La Chanson du Grillon. Edmond Teulet prépare un troisième volume, La Chanson légendaire. "Il fonda les soirées du Grillon et procura ainsi à ses collègues l'occasion de se produire à ses côtés, du Tonneau-de-Diogène, rue des Lavandières, du café o? est actuellement l'Epi-d'Or, du café de la Presse à la salle des Capucins et à la Galerie-Vivienne. "A quand la Bodinière ?

"Quel que soit le côté critique que semble comporter l'épithète de chansonnier 1830 appliquée à Edmond Teulet comme un cliché, c'est peut-être à cause du caractère romantique de son oeuvre que, plus tard, alors que les chansons dites "Fin de Siècle" seront devenues plus surannées que ne le sont, de nos jours, les chansons mythologiques, ? certaines chansons de Teulet resteront, émergeront, défendues par la grâce de leur poésie et par la fra?cheur de leur naïveté."

Pour subvenir aux besoins des premières années, Teulet fut tour à tour commis de librairie, secrétaire de l'exposition des artistes indépendants, imprimeur typographe, chanteur acteur, etc. C'est dans La Tribune, d'Eugène Imbert, qu'il publia son premier sonnet ; il fit insérer sa première prose, Contes à Mignonne, dans le Quartier-Latin, que dirigeait alors le frère du député Maujan ; il collabora ensuite à La Revue critique, au Courrier français, au Rapide, o? il fit la critique dramatique et le courrier des théâtres ; à La Famille, à L'Attaque à L'Ernest Gegout,?actuellement rédacteur au Drapeau, ? au Supplément du Petit Parisien, au Siècle typographique, au Nouveau Journal, etc. Il fonda deux feuilles littéraires, Le Farfadet et Le Grillon, o? il organisa des concours littéraires et poétiques dont les résultats furent souvent intéressants. Sous le titre La Chanson à Montmartre, il a donné dans le Supplément, avec des portraits-charges de Gr?n, une monographie restée inachevée, et L'Enquête de La Chanson, à la suite de laquelle le sceptre de Prince des Chansonniers échut à Xavier Privas ; enfin, il a fait au Petit National La Chanson française, et, pendant trois ans, La Chanson de la Semaine à la Paix ; il donne actuellement une chanson par semaine au Supplément, sous cette rubrique : La Chanson qui passe, et envoie aux Tablettes marseillaises un mensuel Courrier de Paris.

Outre La Chanson du Grillon, il a en librairie Chansons du Siècle moi, avec préface de Jules Claretie (Coutarel, éditeur), et Pierrot Mendiant, une fantaisie en un acte en vers. Il a en préparation deux autres volumes : Chansons à Mignonne, préface de Maurice Boukay, musique de F. Le Rey (Fromont, éditeur), et Chansons de Trianon, musique de H. Brelles, chez Coutarel.

Au théâtre, il a fait représenter Une Coutume espagnole, un acte en collaboration avec J. Ulrich, musique de Mesecki, aux Folies-Belleville ; On fait c' qu'on peut pour la Société des Enfants d'Appollon ; Smart et Marquise, fantaisie mêlée de chant en collaboration avec Monjardin, musique de Le Rey, o? l'auteur donnait lui-même la réplique à Mlle Flor Albine, la gracieuse pensionnaire des Bouffes ; La Lavandière, musique de Hess, et Chez la muse, musique de Marietti.

Teulet a interprété ses oeuvres sur différentes scènes de concert ; d'abord aux vendredis classiques de l'Eden-Concert, au Concert-Parisien, puis à Ba-ta-Clan, au Moulin-Rouge, à la Splendide-Taverne (aujourd'hui Parisiana), au Vingtième-Siècle, au Divan-Japonais sous la direction Sarrazin ; dans les cabarets : le Chien-Noir, les Quat'-z-Arts le Carillon, le Conservatoire de Montmartre, les Noctambules, le Grillon ; et sur de nombreuses scènes de province, notamment à Marseille et à Lille, o? il fit des séjours prolongés.

La critique s'occupa fréquemment d'Edmond Teulet et fut toujours pour lui bienveillante. Francisque Sarcey déclara charmante la voix et impeccable la méthode du chansonnier. Le labeur fourni par Teulet est énorme, et si ? comme il le dit lui-même ? sa gloire est relative, son mérite peut-être discutable, et sa fortune aléatoire, sa sincérité est certaine.

Voici une de ses dernières chansons inédites :

LES ATTENTATS
L'heure est pénible aux potentats,
A leur front pèse la couronne...
Ceux que la misère éperonne,
Que la famine tue en tas,
Croyant leur geste légitime,
Au meurtre poussent l'un des leurs...
Et le sang coule avec les pleurs...
L'histoire ne va pas sans crime.

Le geste est prompt comme l'éclair ;
Il déconcerte, ainsi, les sages ;
Il se répète dans les â ges
Et le pain est toujours trop cher.
Le sang ne peut combler l'abîme.
Mais le coeur de l'humanité Saigne depuis l'antiquité.
L'histoire ne va pas sans crime.

Et le monde nouveau, rêvé
Par des penseurs au front tenace,
Exempt de crainte et de menace,
L'Idéal étant arrivé,
N'évitera pas la victime,
Holocauste du genre humain...
Et verra qui vivra demain :
L'histoire ne va pas sans crime.

Je terminerai en disant qu'Edmond Teulet est officier d'Académie depuis un an.









 Tiercy, Georges

22 février 1861 / 1903
né Georges Léon Stiers

Selon Léon de Bercy dans Montmartre et ses chansons, Paris 1902 :

Tïercy, professeur de mimique,
Est l'enfant gâté du succès.
L'Opéra, l'Opéra-Comique Se l'arrach' ainsi qu"les Français.
Mais quell' que soit sa réussite,
Il vous dit d'un ton suffisant :
"Faut m'entendre quand j'ai ma cuite !
"C'est alors que j' suis amusant. "

Ainsi le présentait, il y a quelques années, au public des Quat'-z-Arts, notre regretté camarade Gaston Sécot.

Georges-Léon Stiers, dit Tiercy, vit le jour à Lille le 22 février 1861. A l'âge de dix-huit ans, après avoir décroché son baccalauréat es sciences, il resta, pendant quinze mois, élève en pharmacie chez un potard lillois ; après quoi, il se rendit à Roubaix, o? il fut employé d'abord comme tailleur de laines dans la maison Amédée Prouvost, puis en qualité de vendeur chez Wattine, Bossut et fils. Mais depuis longtemps déjà, la toquade du théâtre le démangeait. Arrivé à Paris en septembre 1882, il se rend chez Saint-Germain, qui, afin qu'on ne reconnaisse pas l'accent flamand du nouveau débarqué, lui fait apprendre le monologue de Petit-Jean, des Plaideurs, avec quoi il le présente aux examens du Conservatoire.

Tiercy est retoqué : on ne lui a pas reconnu assez de voix. Le lendemain de son échec, un camarade le conduit à Régnier.

"-- Vous ne connaissiez donc personne dans le jury ? lui demande malicieusement celui-ci.

"-- Non, répond naïvement Tiercy.

"-- Ah ! dame, fit Régnier ; vous étiez quatre-vingts candidats, et il n'y avait que neuf places à prendre..."

Mais le jeune homme ne se décourage pas. Il entre chez Got comme auditeur, prend des notes qu'il amplifie en les relevant (il se montre aujourd'hui tout fier de les avoir conservées) et se présente aux examens de 1883, sûr de lui-même. La malchance cependant le poursuit. A l'appel de son nom, Tiercy n'est pas dans la salle : un besoin aussi naturel qu'irrésistible l'a forcé de s'absenter quelques instants. On ne l'examine que le lendemain ; mais le classement, déjà, était fait... Got le console de son mieux :

"? Je considère, lui dit-il, que vous en savez assez, et je vous conseille de vous essayer n'importe où."

Aidé par sa famille, qui lui faisait une pension mensuelle de deux cents francs, le futur acteur occupe les loisirs de l'attente à composer ses premières chansons. En 1884, Jeanne Granier le présente à M. Aurelle, directeur du théâtre de Contrexéville, qui se l'attache à raison de cent francs par mois. Au bout de la saison, il rentre à Paris et se fait engager aux Menus-Plaisirs pour tenir un rôle dans Au Clair de la Lune, revue de Montréal et Blondeau, aux mêmes appointements, mais avec une promesse d'augmentation de cinquante francs, laquelle est bientôt considérée comme "dépense inutile" par Blandin, le directeur, dont Tiercy se sépare, courroucé.

Fin 1885, le poète Armand Silvestre fait engager à l'Eden-Concert,, où il remplace Limat au pied levé. Pendant trois mois fil chante là ses propres chansons et ne fait aucun effet. En mai 1886, il part pour Alexandrie avec un engagement au théâtre du Paradis ? un véritable enfer ! ? attrape la dyssenterie et rentre en France en avril 1887 pour aller jouer, aux Bouffes-du-Nord, le cocher du Fiacre 117. En septembre 1888, M. Carpentier, directeur des Décadents, lui ayant fait une place dans sa maison, Tiercy, travesti en vieille concierge, y crée sa désopilante chanson Ah ! mes Enfants ! dont le timbre, si étrangement radoteur, a été et est encore maintes fois emprunté par les chansonniers ou les revuistes. Pendant l'Exposition de 1889, nous le trouvons à la Nouvelle-Bastille. Mais sa famille menace de lui couper les vivres. Force lui est de reprendre le commerce ; il entre donc comme vendeur dans une maison de produits chimiques de la rue Saint-Merri. Au commencement de 1891, il apprend que Trombert vient d'ouvrir l'Hostellerie-du-Lyon-d'Or ; il y court et se fait admettre pour y chanter ses œuvres ; il part en tournée avec Goudezki, Fragson, Mlle Nicolini et quelques autres camarades ; à son retour, Jules Roques l'engage au théâtre de la Tour Eiffel ; il va ensuite passer quelques mois à l'Alcazar Royal de Bruxelles, revient à nouveau à Paris, chante aux Quat'-z-Arts et, à la fin de 1893, fonde le Carillon, où il obtient un véritable triomphe avec son Clown Badaboum et son Opéra Maboul.

Très maladroit comme limonadier, il dépense vingt mille francs dans cette entreprise ; il retourne alors aux Quat'-z-Arts, où le public lui fait fête. En décembre 1895, il décide Oller, directeur de l'Olympia, à annexer à ce music-hall un cabaret de chansonniers : le Sans-Souci. Tiercy y fait débuter les chansonniers Moncet et Louis Hébert ; il y produit l'acteur Berthès ainsi que Mlles Marie Leroy et Aumont ? qui trouve là un engagement pour la Scala ? et y donne une revue en ombres de Grün : Paris Sans-Souci. Cette tentative fut heureuse ; toutefois, le gourmand directeur de l'Olympia, jugeant les bénéfices insuffisants, le Sans-Souci ferma définitivement ses portes en avril 1896. Depuis cette époque, Tiercy s'est fait applaudir un peu partout, dans les cabarets de Montmartre et du Quartier-Latin et dans les nombreuses tournées qu'il a entreprises ou dont il a fait partie.

Il faut voir et entendre ce chansonnier pour se faire une idée de la rapidité avec laquelle il fait exploser le rire, tant par la drôlerie des sujets qu'il traite que par l'extraordinaire mobilité de son masque de Pierrot paillard, rigoleur, clownesque et fûté. Et les auditeurs s'amusent si foollement qu'ils ne peuvent se résoudre à le laisser partir. Dans la coulisse, Tiercy tempête contre les bravos qui le rappellent, il les laisse se prolonger jusqu'au tumulte, consent enfin à aller saluer, fait mine de quitter le tremplin puis la scène, et ravi au fond il se remet au piano pour cinq, dix et même quinze minutes. En fin de compte, il retempête, prend en hâte son chapeau et son pardessus, crie qu'il va manquer son train, tire vingt fois sa montre et... commande un demi qu'il déguste à petites lampées.

En dehors de ses chansons, Georges Tiercy a écrit quelques revues dont il fut le seul interprète : La Revue de Pierrot, donnée à la Bodinière en 1896 avec une causerie de Xavier Privas ; La Revue de 1897, qu'il débita et chanta cent trente et une fois aux Noctambules ou aux Quat'-z-Arts ; et Le Camelot Nouveau Siècle, représenté par lui en 1900 aux Noctambules et au Grillon. En 1898, il tenta, Chaussée-d'Antin, l'établissement du Théâtre-Tiercy, o? il rêvait de faire représenter de petites comédies ou de petits opéras-comiques anciens. La maladie seule l'empêcha de réaliser cet essai. Son grand bonheur serait d'établir avec quelques camarades ? quatre au plus ? une tournée continuelle qui s'installerait au hasard des villes et des établissements et qui donnerait une revue qu'on intitulerait Salade Russe, dont le fond materait le même, mais dont certaines fines seraient constamment renouvelées selon la marche des événements.







 Tinchant, Albert

Albert Eloi Tinchant né à Paris le 13 avril 1860 et décédé à Paris le 10 novembre 1892.

Selon Léon de Bercy dans Montmartre et ses chansons, Paris 1902 :

Poète délicat et pianiste habile, Albert Tinchant fut longtemps accompagnateur du Chat Noir. C'est lui qui fournit à Delmet les premières poésies que celui-ci mit en musique. Comme Mac-Nab, il mourut jeune et emporta avec lui les regrets sincères de tous ceux qui l'avaient connu. Voici un sonnet de cet aimable aède :

Messe de minuit

La nef d'or se remplit de fleurs et de clarté
Sous la voûte gothique aux folles ciselures;
L'encens monte au concert des voix jeunes et pures
Et d'un nuage bleu couvre l'autel sculpté.


Les femmes, admirant la divine beauté,
Vont aux pieds du Seigneur déposer leurs parures;
Quelques hommes perdus dans ce flot de murmures
Rêvent tout bas d'azur et d'immortalité.


Or, tandis que votre âme au ciel s'envole encore,
Voulez-vous que tous deux, sur le clavier sonore,
Au retour, nous chantions quelque no?l pieux ?

Puis, selon la coutume, en votre cheminée
Placez votre soulier si mignon, car je veux
Y mettre avec mon coeur la bague d'hyménée.



 Tourtal, Victor

Auteur et interprète (1862-1917). De son vrai nom Lucien Pourtal. Débute en 1900 au Grillon. Passe dans divers cabarets (Quat'-z-Arts, Purée, Noctambules) puis fonde la Chaumière.

Source : "La chanson?sous la IIIe république" de Serge Dillaz.

Et selon Léon de Bercy dans Montmartre et ses chansons, Paris 1902 :

Est né à Nantes, le 21 octobre 1868. Orphelin de père et mère à l'?ge de sept ans, la Compagnie d'Orléans se charge de son éducation et le confie aux soins de l'abbé Verdier, chanoine titulaire de la métropole de Tours. Son adolescence se passe dans l'établissement de ce vénérable chanoine, jusqu'au jour o?, pr?t à rentrer dans les ordres, sa vocation s'y refusant, il quitte l'étude pour la littérature, et collabore à de petits journaux littéraires. Part au régiment, est réformé après onze mois de service. Reste malade pendant quatre ans, est traité comme phtisique tuberculeux troisième période, est administré trois fois et sort de l'h?pital mieux portant que jamais. Arrive à Paris en 1892, fait une courte apparition dans la presse, ? o? i il signe du pseudonyme de Georges Méridan, ? quitte bient?t le journalisme pour retourner à la littérature, et redevient collaborateur assidu de plusieurs feuilles littéraires, jusqu'au jour o? il laisse le r?ve pour la satire. Chante ses premières chansons au Cabaret des Quat'z'Arts et aux Funambules et, remarqué par Marcel Legay, passe au Grillon. Il y obtient un gros succès et a l'honneur d'?tre littéralement assommé par une bande d'énergumènes, conduits par M. de Martel fils, à propos d'une chanson intitulée : L'Enlèvement de Mme Gyp raconté par elle-m?me. Fait plusieurs tournées en France, est actuellement de retour au Cabaret du Grillon. Il est aussi fournisseur du café-concert. Je donne, ci-dessous, une chanson avec laquelle il se fait applaudir chaque soir.

LES PHILANTHROPES

Pour le bonheur des malheureux,
Il est des gens qui, sur la terre,
Sont toujours doux et généreux
Vis-à-vis du pauv' prolétaire :
Un manchot, ?a les fait frémir,
Un aveugl' leur donne un' syncope,
Un cul-d'-jatt', ?a les fait partir.
Ils sont tendres, les philanthropes.

Mais comme ils ne peuvent de près
Contempler la misère humaine
Ils font le bien très en secret,
Car, la réclame, ça les gêne.
Tous les lundis, c'est régulier,
A douze malheureux l'on donne,
A la porte de l'escalier
De service, un sou par personne.

Quand arrivent les froids hivers,
Les deux pieds dans la cheminée,
Ils versent tics pleurs très amers
Sur les pauvr's et leur destinée.
Ils donn'nt des bals de charité
En l'honneur des pauv's prolétaires ;
On bouffe, on danse à leur santé
Parait qu'?a soulag' leurs misères.

Les malheureux certainement
Ne sont pas leurs seules pratiques ;
Ils protègent également
Toutes les choses artistiques ;
Comm' ils sont très intelligents,
Ils ont des idé's généreuses,
Et dépensent par an cent mill' francs
Pour entretenir un' danseuse.

Si par hasard, sur leur chemin,
Un pauvre mendiant débile
Timidement leur tend la main,
Ils appellent un sergent d' ville :
C'est pour la loi, bien entendu !
Au fond, ?a leur fait de la peine,
Mais, mendier, c'est défendu
Dans 1' département de la Seine.

Puis, quand survient le grand départ,
Ces philanthropes admirables,
De leur fortune font deux parts :
C'est si doux d'?tre charitable.
D'abord ils lègu'nt une moitié
A l'?glise pour des prières ;
L'autre c'est pour leurs héritiers ;
Le restant, pour les prolétaires.

Après leur mort, en notre nom,
L'Etat leur colle un joli buste.
Cett' fois-ci, c'est nous qui casquons :
Chacun son tour, c'est assez juste.
Des orateurs très éloquents
Font des grands mots à leur mémoire.
Moi, j' crois plut?t que d' leur vivant
Ces gens-là s' sont foutus d' nos poires



 Toziny, Roger

né le 24 septembre 1884 à Blaye (33 - Gironde) et décédé le 3 mars 1939 à Paris 10e.

Selon : "La chanson?sous la IIIe république" de Serge Dillaz. :

Auteur et interprète né en 1883, décédé en 1939. De son vrai nom Henri Tauzin. Pensionnaire du Caveau et du Chat Noir, il part fonder un cabaret artistique à Marseille. De retour à Paris après la guerre, il fonde le Cabaret de la Vache enragée.

 




 Trébitsch, Alexandre

né le 25 mai 1862 à Paris 2e et décédé le 5 mai 1937 à Paris 10e.

Auteur dramatique et parolier à qui l'on doit notamment :







 Trébor, Max

Max Trébor est né François Robert Halma, à Paris 13e, le 11 janvier 1897, fils de Constant Paul Halma, lui-même artiste du spectacle, descendant, selon Max, d'une famille dont tous les membres furent comédiens ou chanteurs depuis la fin du XVIIIe siècle. - Ses débuts, il les fait au Concert-Mayol en 1916 dans une revue qui s'intituleTout va bien. - Mobilisé l'année suivante, il est fait prisonnier pour n'être libéré qu'à l'armistice, en 1918. En 1919, il remonte sur scène ( Gaîté-Montparnasse) d'où, jusqu'en 1939, il sera, soit en tournée, soit en vedette et même directeur ou metteur en scène de multiples revues : au Théâtre Montmartre, aux Folies-Dramatiques, aux Folies-Belleville, au Casino Montparnasse, au Concert du XXe Siècle, au Casino Saint-Denis, au Palais du Travail, aux Folies Voltaire, à la Gaîté Rochechouart, au Concert Brunin, au Casino Saint-Martin, au Zénith, à l' Européen, au Printania... pour n'en nommer que quelques-uns !

Succès indéniable mais peu du genre vedétariat. Max Trébor fut un chanteur "connu" certes, évidemment apprécié, toujours en demande, mais dans un style plus ou moins imprécis : celui d'un chanteur de charme, d'un diseur, plutôt mondain, plutôt sentimental, mais souvent tourmenté, déçu, mal-aimé (il a repris le grand succès d' Yvonne George, "Pars").

Sa discographie est relativement mince : moins de cinquante titres entre 1921 et 1935 dont les derniers sur supports cartonnés (voir ci-contre). - Pas de repiquage selon nos dernières recherches.

On parle d'une diction genre Mayol, d'un style genre Dalbret, d'un répertoire genre Dickson...

Sa dernière présence sur scène ? - En 1939, aux Folies-Belleville dans la revue Yop la Boum. - On ne le retrouve plus à l'affiche par la suite.

Max Trébor s'est suicidé à 47 ans le 29 avril 1944, à Paris 9e.



 Trimm,Timothée

Chroniqueur, écrivain et journaliste français né,  Antoine Joseph Napoléon Lespès, le 18 juin 1815 à Bouchain (59 - Nord) et décédé le 22 avril 1875 à Paris 10e.

Il était aussi connu sous le pseudonyme de Léo Lespès et comme l'un des fondateurs, en 1862, du Petit Journal. Mais avant cela, il fut militaire puis détective privé auprès de Vidocq. Il est également l'auteur de la préface de l’ouvrage de Mennetière sur les cafés-concerts, en 1870 : Les étoiles du café-concert

 



Cliché Henri Manuel


Dessin de Léandre - 1808

Cliché P. Petit


Les trois illustrations ci-dessus
proviennent du site Gallica
et celle ci-contre, à droite de
Paris Qui Chante - 1904



 Trimouillat, Pierre

Michel Herbert dans La chanson à Montmartre (Edition de La Table ronde - 1967) nous signale que Rodolphe Salis n'hésitait pas à présenter Pierre Trimouillat (après avoir ordonné aux garçons d'ouvrir les fenêtres afin que sa voix puissante ne fasse pas éclater les vitres) comme suit :

"Nobles dames et gentilshommes, vous allez entendre maintenant le baron PierreTrimouillat dans ses œuvres... À ceux d'entre vous qui fréquentent le Bois, le matin, je n'ai pas à présenter le baron Trimouillat car ils ont plus d'une fois croisé dans l'allée des Acacias un brillant cavalier montant dans un style impeccable un merveilleux pur-sang aux lignes aristocratiques... C'est lui !"

Et voilà que montait sur scène un petit homme souffreteux, timide, myope, au corps fluet avec "des extrémités à rendre jalouse plus d'une Parisienne" ( de Bercy), qui, d'une voix fluette, débitait de petites œuvres bien écrites, bien rimées, certes, mais "dont l'absence d'originalité en constituait une dans ce milieu où il était d'usage de bouleverser les règles établies" (idem).

Gaston Sécot (cité par le même) :

"Des ch'veux, un binocle, un' moustache,
Ça fait un Trimouillat r'ssemblant
Qui nous produit des vers sans tache
De sa voix fin' comm' son talent.
C ' qui l'embêt', c'est qu'on n' puisse entendre
Les chefs-d'œuvre qu'il pond par tas ;
Hélas ! son organe est si tendre
Que lui-même il n' les entend pas."

Né à Moulins en 1858, dans une famille honnête, "mais ennemie des arts" ( de Bercy, encore), qui lui prédit, dès ses premiers essais de chansons, "la prison, les galères et le couperet".

"Dans sa jeunesse, - nous dit Horace Valbel (Les Chansonniers et les Cabarets artistiques de Paris, E. Dentu, édit. - Paris - 1895) - pour se distraire et par goût, il récitait, soit chez les siens, soit en soirées, les vers et les monologues des autres ; puis, un beau jour, il composa un monologue dont il se refusa à citer l'auteur et qui obtint un franc succès."

Succès aidant, il vint à se produire au Chat Noir (1891), puis au concert de La Nouvelle Athènes, au Paradis Latin, à la Goguette, aux Quat'Z'arts, au Caveau, aux Noctambules, à Arts et Lettres, au Conservatoire de Montmartre, au Chien Noir... bref dans tous les cabarets ou "Cafés" où l'humour était de mise car le Monsieur était un satiriste de tout premier ordre.

Dit " le baron de l'humour" ( Rodolphe Salis), ses vers et chansons ont quelque peu perdu, avec le temps, leur mordant mais sont passés à l'histoire :

"À la brasserie", mis en musique par Jules Lasaigues, créée par Yvette Guilbert (voir le numéro 220 - de nos pages sur les Chansons illustrées - première série).

La corde, un monologue en vers, créée par Saint-Germain du Palais-Royal ( numéro 38, même rubrique mais deuxième série).

Et ce petit chef-d'œuvre que fut :

Le bègue, un monologue en vers libres créé par De Féraudy de la Comédie française au numéro 200 de la même série (et repris au numéro 85 de la deuxième).

... au sujet duquel il disait, lui-même :

Faire bégayer Féraudy,
Un si fin diseur, c'est un crime.
Écrire une scène afin d'y
Faire bégayer Féraudy,
C'est bien l'acte le plus hardi
Que puisse faire un fou qui rime :
Faire bégayer Féraudy,
Un si fin diseur, c'est un crime.

... et à propos duquel, de Bercy raconte l'anecdote suivante :

"C'était à une grande représentation donnée au bénéfice de je ne sais plus quelle œuvre. Trimouillat était au programme. Son tour arrive. Il dit le Bègue avec son habituel talent. À sa sortie de scène, les applaudissements éclatent et l'auteur est rappelé. Pendant que celui-ci se laisse légèrement tirer l'oreille, une spectatrice, ma voisine, jeune et jolie femme, d'allure très parisienne, se penche de mon côté et me dit :

- "Ils sont fort jolis, ma foi, les vers que vient de dire ce monsieur. Mais comme c'est dommage qu'il bégaie !
- N'est-ce pas, madame ?" répondis-je, compatissant.

Sur ce, l'auteur du Bègue reparaît et un second monologue s'échappe de ses lèvres avec la limpidité d'une source cristalline. Tête de la dame, qui ne comprend plus et qui me jette un regard de défiance..."

En ajoutant :

"... elle demeura un instant interloquée, puis se signa, croyant en un miracle et assimilant probablement l'endroit où nous trouvions à Notre-Dame de Lourdes."

Quoiqu'il ne mourut qu'en 1929, Trimouillat disparut de la scène, sauf pour quelques apparitions pour des œuvres de charité, peu après 1900 consacrant le reste de sa vie à sa "véritable" carrière de... fonctionnaire à la Préfecture de Paris (service des égouts !).

La plupart de ses écrits furent réunis, en 1931, peu de temps après sa mort sous le titre de :

Ballades, chansons, fantaisies, monologues, parodies, poèmes divers (de Pierre Trimouillat), sous le patronage de Maurice Donnay, Edmond Haraucourt, Charles Léandre, préface par Jacques Ferny, postface par Alcanter de Brahm, chez Stock, Delamain et Boutelleau.

Pour terminer, nous donnons au complet la biographie écrite par Léon de Bercy dans Montmartre et ses chansons, Paris 1902 :

Une chevelure épaisse, broussailleuse, bouclée, noire et lustrée ; au-dessous, surmontant un nez minuscule qui flaire ? selon l'heure ? le soleil ou les étoiles, un binocle derrière quoi pétille un regard souriant, chercheur et vif ; une moustache hérissée ; une bouche petite et sensuelle ; une barbiche tourmentée ; des épaules étroites, un corps fluet et des extrémités à rendre jalouse plus d'une Parisienne : voilà le portrait physique de Trimouillat. Quant au reste, voici la façon dont son noble ami le Prince des Chansonniers le présenta naguère au public [La Chanson à Montmartre, Librairie Internationale ; Paris, 1900] :

"SES TITRES : baron de Montmartre (de par la grâce du seigneur Salis) [N. d. A] et prince du Rire.
"SES QUALITÉS : poète, chansonnier, satirique, spirituel et bienveillant. Ne blesse pas : effleure, pince, égratigne.
"SON CORPS : un roseau pensant et chantant.
"SA VOIX : varie selon l'heure et le lieu. "? Le jour, dans son bureau : une flûte. "? Le soir, devant le public : un écho. "? La nuit, dans la rue : un ouragan.
"SES ŒUVRES : des chansons et des monologues où l'esprit le plus délicat lutte avec la Forme la plus soigné et la Rime la plus riche.
"SES AMIS : ceux qu'il blague. (Tout le monde.)
"SES ENNEMIS : les autres. (Personne.)
"SES VERTUS : aime à voir lever l'aurore.
"SES VICES : aime à voir coucher la lune.
"SON AMBITION : être enterré à l'Odéon.
"SON ÂGE : sera toujours jeune, puisque l'esprit et le cœur des poètes ne vieillissent pas."

Gaston Sécot écrivit sur lui le couplet suivant :

Des ch'veux, un binocle, un' moustache,
?a fait un Trimouillat r'ssemblant
Qui nous produit des vers sans tache
De sa voix fin' comm' son talent.
C ' qui l'embêt', c'est qu'on n' puisse entendre
Les chefs-d'oeuvre qu'il pond par tas ;
Hélas ! son organe est si tendre
Que lui-même il n' les entend pas.

Trimouillat ne m'en voudra certainement pas d'être, touchant son âge, moins discret que Privas ; et je ne crains pas qu'il manque une seule de ses futures conquêtes parce que j'aurai dit qu'il naquit à Moulins, en 1858, d'une famille honnête, mais ennemie des arts, laquelle lui prédit, dès ses premiers essais de chansons, la prison, les galères et le couperet. Cette horrible perspective ne diminua en rien le zèle de l'adolescent chansonnier.

"Dans sa jeunesse, ? nous dit Horace Valbel [Les Chansonniers et les Cabarets artistiques de Paris, E. Dentu, édit. ; Paris, 1895] ? pour se distraire et par goût, il récitait, soit chez les siens, soit en soirées, les vers et les monologues des autres ; puis, un beau jour, il composa un monologue dont il se refusa à citer l'auteur et qui obtint un franc succès."

Plusieurs personnes l'ayant félicité sur le choix de "son nouveau répertoire", Trimouillat résolut de ne plus se produire que dans ses propres oeuvres. Vainquant sa native timidité, il vint à Paris, o? il se fit admettre, en 1880, au sein de la Lyre Bienfaisante, qui voisinait place Saint-Michel avec les Hydropathes et o? Jules Jouy, Lebesgue (qui ne s'appelait pas encore Georges Montorgueil), Emile Herbel, Eugène Lemercier, Edmond Teulet et quelques amateurs chantaient leurs productions. De 1883 à 1885, il fréquenta les soirées de la Société Littéraire et Dramatique [Cette Société, qui avait pour but "de développer le goût de la littérature et du théâtre, et plus spécialement de faire conna?tre les ?uvres des Jeunes", avait été créée le 17janvier 1883,et le comité de fondation se composait de : J. Amoureux, président ; A. Coutard et E. Châtelain, vice-présidents ; J. Solin, trésorier, et G.Amyot, secrétaire. Elle avait son journal : Premières Armes, brochure de 32pages, paraissant mensuellement], que présidait le "père" Eugène Châtelain et dont faisaient partie Tarride, Georges Berr, Gustave Amyot, Eugène Pottier, Fernand Clerget, Calmette, Paul Plan, Auguste Blosseville, Edouard Dubus, Alphonse Coutard, Teulet, Grenet-Dancourt, Marandet, C. Savoye, J. Corrot, T. Cuvelier, Lemercier, Edmond Char et Mlle Weber, devenue par la suite Mme Segond-Weber.

Ces soirées se tenaient chez Eugène Châtelain, 45, quai de la Tournelle. C'est à l'une d'elles que je rencontrai pour la première fois Trimouillat ; et je m'y amusai follement à lui entendre dire le Bègue, ce monologue que M. de Féraudy détaille avec tant de finesse et au sujet duquel l'auteur versifia cette courte préface :

Faire bégayer Féraudy,
Un si fin diseur, c'est un crime.
Ecrire une scène afin d'y
Faire bégayer Féraudy,
C'est bien l'acte le plus hardi
Que puisse faire un fou qui rime :
Faire bégayer Féraudy,
Un si fin diseur, c'est un crime.

Il me revient à ce propos une bien amusante anecdote. C'était à une grande représentation donnée au bénéfice de je ne sais plus quelle oeuvre. Trimouillat était au programme. Son tour arrive. Il dit le Bègue avec son habituel talent. A sa sortie de scène, les applaudissements éclatent et l'auteur est rappelé. Pendant que celui-ci se laisse légèrement tirer l'oreille, une spectatrice, ma voisine, jeune et jolie femme, d'allure très parisienne, se penche de mon côté et me dit :

"? Ils sont fort jolis, ma foi, les vers que vient de dire ce monsieur. Mais comme c'est dommage qu'il bégaie!

"? N'est-ce pas, madame ?" répondis-je, compatissant.

Sur ce, l'auteur du Bègue repara?t et un second monologue s'échappe de ses lèvres avec la limpidité d'une source cristalline. Tête de la dame, qui ne comprend plus et me jette un regard de défiance...

Trimouillat fut un des assidus des réunions de la Plume, qui se tenaient au sous-sol du café du Soleil-d'Or, 1, place Saint-Michel, dans la salle o? les Hydropathes donnaient leurs séances. C'est là qu'il lia connaissance avec Xavier Privas.

Après une fugue à Angers, il revit Paris, et Jean Rameau l'introduisit et au Chat Noir. Cette première présentation fut vaine et ce n'est qu'en 1891 que Jules Jouy, qui présidait la goguette du célèbre cabaret, l'engagea définitivement avec le titre de "Ma?tre des Chants ". Les autres emplois étaient tenus par Armand Masson et Jacques Ferny, vice-présidents ; Pierre Delcourt, secrétaire ; D.Pelet, grosse caisse ; George Auriol et Rodolphe Salis, huissiers-audiencier. Le succès de Trimouillat fut complet ; et si la voix du chansonnier n'arrivait pas à émouvoir les vitres de l'hôtel de la rue de Laval, l'acuité de son ironie, la pureté de sa forme et la richesse banvillesque de ses rimes provoquaient des bravos qui ébranlaient les murs. Je citerai, entre autres jolies choses : Lettre d'un Commis Voyageur, le Flâneur parisien, les Pochards, A Vue de Nez, Quand Sarcey dort, la Gosseline, Ma femme et moi, la Dernière Ma?tresse, le Concierge, qu'illustra, pour le Gil-Blas, le magistral crayon du ma?tre Steinlen. Il se fit applaudir également aux soirées du Grillon, ? qu'avait instituées E. Teulet, ? aux Quat'-z-Arts, et dernièrement au cabaret des Arts.

L'oeuvre de Trimouillat est nombreuse et diverse ; l'intérêt n'y languit jamais ; et elle procure autant d'intérêt à la lecture qu'à l'audition. Des artistes de tout premier ordre se sont offerts à l'interpréter : Pierre Laugier, le Bandeau ; Mlle Reichenberg, l'Octroi; Saint-Germain, la Corde ; Le Bargy, Lettre Close; Georges Berr, le Vengeur ; Félix Galipaux, le Faux Nez ; Dumény, l'Argent ; Duard, l'Araignée [Ces huit monologues sont publiés séparément par l'éditeur Stock] ; Yvette Guilbert, les Gras et les Maigres, A mon Septième, etc., etc.. De plus, les parodies de Trimouillat ont converti le monologuiste Coquelin cadet en chanteur d'opéra [J'exagère un peu, car Coquelin cadet a déjà interprété, il y a quelques lustres, chez Mme Adam, Aveugle par Amour, de Charles de Sivry ; dans les Précieuses Ridicules, il chanta l'Impromptu, de Lulli; et dans Hamlet, les trois couplets du fossoyeur composés par Ambroise Thomas sur des vers de Dumas. Il chante également l'air de la Bouteille dans le Médecin malgré lui, très agréablement, ma foi]. L'excellent comédien doit quelques-uns de ses innombrables triomphes à l'amusante blague de notre chansonnier, qui écrivit pour lui, tout spécialement, sur la musique de Tagliafico : Quand le Critique dort [Langlois, éditeur] :

Voulez-vous bien ne plus dormir,
Bouche ouverte et paupières closes,
Quand, pour vous voir rire ou frémir,
En scène on crie, on prend des poses...
Pour bien rendre compte des choses,
Voulez-vous bien ne plus dormir.

A son intention il parodia Pensées d'Automne, d'Armand Silvestre et J. Massenet, et en fit Idées d'automne ou le Vieux Tribun ; il transforma de même le Crucifix, qui devint, sous sa plume, le Proesesfix :

Vous qui priez pour que Loubet tombe ou qu'il meure,
Vous qui ragez ? s'il est souffrant ? lorsqu'il guérit;
Vous qui fuyez loin de l'Elysée, sa demeure ;
Vous qui croyez ce qui, parfois, sur lui s'écrit ;
Vous qui boudez, venez à lui, car il sourit.
Gens aisés, songez qu'il tient l'assiette au beurre !
Réfléchissez, venez à lui, car il demeure.

Sa dernière parodie est sur l'air Tout le long du Ruisseau et s'intitule Millerand et Waldeck-Rousseau ; et je voudrais, si la place ne m'était mesurée, la transcrire ici tout entière. En voici les derniers vers :

Millerand et Waldeck-Rousseau ?
Unis sans penser même chose ?
Sont comme l'épine et la rose
Qu'on voit sur le même arbrisseau.

A la fin de l'année 1893, Trimouillat fonda le journal le Gringoire, littéraire et artistique, bi mensuel, administration et rédaction, 1, place de l'Odéon, puis 13, rue de l'Ancienne-Comédie, o? le journal augmenta son format et devint illustré. Cette publication s'occupait de lettres et d'art dramatique ; elle était rédigée avec goût par des poètes qui ? naturellement ! ? dénués de tout sens commercial, ne rêvaient qu'embellissement et négligeaient le "mur". Ils laissèrent mourir leur feuille à son premier automne, en même temps que les rameaux du Luxembourg.

Il institua, en compagnie de Gaston Dumestre et de Xavier Privas, les Soirées-Procope, rue de l'Ancienne-Comédie, au rez-de-chaussée du café d'illustre mémoire. Bientôt, en présentant au lecteur le Prince des Chansonniers, j'aurai l'occasion de m'occuper de ces intéressantes réunions.

Disons, pour terminer, que Trimouillat m'a assuré que l'année 1902 ne se passerait pas sans voir para?tre de lui deux volumes, à l'ordonnance desquels il travaille durant les heures de loisir que lui laisse son emploi à la Ville (service des ?gouts ? ô ironie !) : Dans la Vie, chansons et monologues, et Contes à dire debout. Je le souhaite de grand coeur, certain d'avance du succès de ces ouvrages



 Trombert, François

Natif de Lyon, François Jacquet dit François Trombert est le fondateur, en 1893, du Cabaret des Quat'-z-Arts et en 1897, du journal Les 4'z'Arts. Trombert avait déjà fondé le cabaret du Lyon d'Or, le théâtre d'ombres lyriques avec les Hydropathes Georges Fragerolle, Emile Goudeau et de Goudezki

Trombert aimait boire et ne s'en cachait pas, quand on lui reprochait de consacrer tout son argent dans les cafés, il répondait : "je place mon argent à zinc pour cent."






Caricature de Léandre : Auguste Tuaillon épouse la princesse Blanche suivi de Jehan Rictus et Guirand de Scevola

 Tuaillon, Auguste

Le nain Auguste. né en 1873. Passa aux Quat'-z-Arts de 1896 à 1903 puis aux Noctambules.

 

Source : "La chanson sous la IIIe république" de Serge Dillaz.

Auguste Tuaillon,dit Boffy. Né à Esmoulières, canton de Faucogney (70 - Haute-Saône) le 18 mars 1873. Âgé de 23 ans, signalé par la plupart des journaux, à l'occasion de son appel pour le recrutement militaire. Déclaré justement "le plus petit conscrit de France" car sa taille, à cette époque était, parait-il, 0 m. 97 et son poids 17 kilogrammes. Ensuite, son poids ne sera pas supérieur, à ce qu'il assure. Quant à sa taille, elle est de 0 m. 997. Ensuite il est parvenu à l'âge adulte avec une assez bonne santé. Auguste Tuaillon est arrivé à Paris, dans un café-restaurant voisin de la gare de Lyon, où il est employé. Il prend part, à titre spécial, à des concerts d'ordre modeste et contribue par sa présence au succès de l'établissement. ; Bien que son nanisme soit très suffisant pour attirer sur lui l'attention et la curiosité du public, Auguste Tuaillon, sans avoir cultivé, à proprement parler, l'art lyrique populaire, a appris à se présenter assez gentiment. Il débite pour cela un long boniment humoristique composé par une dame, et qu'il accompagne de quelques chansonnettes et monologues. Il veut bien donner à la société d'anthropologie un spécimen de son travail, et vous pourrez juger que celui-ci est accompli d'une façon très satisfaisante. Avant de venir à Paris, il a gagné sa vie, depuis l'âge de 15 ans environ, en exhibant sa petite personne et ses petits talents dans diverses localités de l'Est, notamment à Luxeuil-les-Bains, non loin de son pays natal, et à Nancy".

Il réside boulevard de Clichy en compagnie de son ami et pays le nain Delphin.

Surnommé Le Don Juan de Montmartre, Auguste eut de nombreux succès amoureux, les exploits de ce "lion" fameux furent célébrés par d'autres chansonniers qui l'entouraient. Gérant de brasserie à ses débuts, passa aux Quat'-z-Arts puis rejoint Eugénie Buffet lorsqu'elle prit les rênes de la Nouvelle Athènes. A 34 ans, il décède, en quinze jours, de la tuberculose à l'hôpital Lariboisière le 13 novembre 1907.

Ajoutons qu'après son décès à Lariboisière son corps fut autopsié et radiographié sous toutes les coutures.