TABLE DES MATIÈRES
_____________________________________


L'Amérique
Premier voyage en Amérique il y a 33 ans (1894)
Prédiction de Mme de Thèbes
44.000 kilomètres en Amérique
En Amérique pendant et après la guerre
Franchise
Le crépuscule des âmes - Le mariage en Amérique
La femme et l'amour en Amérique
La femme enfant
La jeunesse américaine
Le bluff "the greatest in the world"
Les Mécènes
Une drôle de visite
Le seigneur des chambres noires
Les invitations à double but
Un dîner chez Mrs Rita L.
Le bluff de la charité - Une lettre bouleversante
Le bluff de la charité
Deux glorieuses créatures
Mon "American tragedy"
Mon école à New York
Conclusions de l'Amérique


L'Angleterre
Ma première visite à Londres
Audiences et séjours à Londres
Le singe Consul et moi
Le poète Simon, mon Ronsard
Bernard Shaw ou le penseur éperdu


La Belgique


La Hollande


Du Danemark en Suède et Norvège


L'Allemagne (1897 à 1928)


L'Autriche
Vienne


Hongrie
Budapest


Tchécoslovaquie
Prague


La Pologne
Varsovie
De Cracovie à Varsovie


Russie (décembre 1898)


Roumanie
Bucarest
Jassy


L'Orient
Constantinople (Byzance)


En route pour la Grèce


L'Égypte
Alexandrie
Le Caire


L'Italie
Milano


La Suisse


L'Espagne - Le Portugal


La Côte d'Azur et l'Afrique française


Conclusion

Yvette Guilbert


La Belgique

J'ai déjà dit dans La Chanson de ma Vie que mes premiers succès, ma "consécration" me vinrent de la Belgique. C'est Liège, puis Bruxelles, qui me débarrassèrent de mes affres de la misère. Belgique, tu me fus douce toujours, et mon cœur éperdu dans sa forêt de longue attente te trouva pour m'indiquer la route des espoirs.

Dans mes chansons d'abord - en 1892 ! - puis dans une série d'efforts nouveaux où je m'essayais, avec la volonté de jouer le grand et lourd rôle d'une pièce dramatique, je te retrouvai, Belgique touchante et maternelle.

Quand je relis les critiques de 1907 en ce rôle de La Marciliana, héroïne d'un drame : L'eau trouble, de Jean de Hinx et Edmond Guiraud, je me rappelle mes palpitantes surprises à dévorer les journaux, le lendemain matin ! Quand je fis lire à nos amis de Paris les éloges mêlés des critiques, mais faites de considérations étrangement concluantes sur mes qualités de tragédienne où les influences de la Duse et de Sarah Bernhardt transparaissaient, chacun eut peur que je ne quittasse la Chanson pour la Tragédie, et je l'aurais fait, emballée par mon succès, sans ma connaissauce de l'âme du Paris de l'époque... qui, je le sentais, n'aurait pas volontiers permis deux roses à ma boutonnière. Ce fut au théâtre du Parc que fut donnée L'eau trouble. Jean de Hinx était en vérité une femme du monde, Mme de Gardilanne, étrangement douée.

Venue pendant une série de mes représentations des chants de la Vieille France, au théâtre des Bouffes-Parisiens, elle s'emballa sur mes qualités artistiques et vint un jour m'apporter cette tragédie écrite pour moi. Le théâtre du Parc accepta la pièce qui fut un triomphe.

Le succès n'a point disparu encore de la mémoire de M. Reding, le directeur du théâtre du Parc, et des Bruxellois me rappellent souvent ces belles soirées de 1907 et chacun d'ajouter toujours : "Comment Paris n'a-t-il pas fait de vous sa XXX tragédienne ?"

Chère ville de Bruxelles, chère Belgique, comme vous avez apporté de la bonne joie à ma vie...

Ce fut encore vers vous que j'allai quand, en 1923, revenue d'Amérique, je voulus fonder en Europe le théâtre littéraire et religieux du moyen âge et mettre de la religion dans l'art et de l'art dans la religion. J'allai trouver M. Max, le célèbre bourgmestre, qui tout de suite m'offrit généreusement un terrain pour y bâtir une école des Arts du Théâtre. Horta, le grand architecte belge, en décida les plans, mais les capitalistes belges souffraient encore des blessures de la guerre et l'argent belge commençait déjà à perdre de sa valeur, bref le splendide don de la ville de Bruxelles ne me servit de rien et je revins en France décidée égoïstement à ne plus m'occuper que de moi-même.


«   Retour à la page d'introduction   »